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Pierre Fontaine
La nouvelle course au pétrole (1957)
Extrait :
Avant-Propos
Le 20 décembre 1956, un président du Conseil français, M. Guy Mollet, déclara à la tribune de lAssemblée Nationale : « Nous savons enfin que le chantage au pétrole peut être une réalité. »
Il a fallu trente ans pour que cette évidence connue des initiés et des lecteurs de nos précédents ouvrages devienne un aveu public.
Trente ans pour hisser la question pétrolière à son véritable niveau politique et diplomatique ! Le silence volontaire sur les dessous de cette course au pétrole constitue un handicap de la France et de lEurope dont linsuffisance en sources dénergie obère leur indépendance puisquil est désormais prouvé que les économies intérieures des pays dEurope occidentale sont les esclaves dun carburant étranger lointain et que lénergie pétrolière conditionne une partie du travail national. Nous étions demeurés les seuls dune équipe qui sévertua à essayer de conquérir lopinion à cette vérité : « Un pays assujetti à lextérieur pour une source dénergie qui lui est indispensable nest pas un pays indépendant ; il est forcément satellite de son approvisionneur ». Ce qui explique, en partie, la raison qui mit la France à la remorque de la politique britannique pendant un certain nombre de lustres.
Notre insistance, inspirée de celle du Taciturne, trouva son illustration dans laffaire du canal de Suez dont le sabotage demeure un élément capital dans le triomphe de la géopolitique, une science peu à lhonneur en France.
Le canal de Suez laisse à nouveau passer les tankers, les pipe-lines transdésertiques dynamités sont réparés et permettent au ravitaillement de lEurope Occidentale de redevenir normal. Pour combien de temps ?
La menace dasphyxie européenne demeure la même. Il suffira de quelques minutes de tension pour que tout recommence. 1956 ne fut quune répétition générale dune opération qui ne devait se déclencher quà laube du troisième conflit mondial. Avec la lutte américano-soviétique dans le Moyen-Orient et le Pacte Atlantique, la même opération dinterruption dans lacheminement du pétrole oriental se reproduira. Nous verrons ce quil convient de penser de la route des pétroliers par le Cap, de la politique des supertankers et du ravitaillement par le pétrole africain, moyens qui ne seront jamais que des palliatifs dans un pays anxieux de carburant pour ses moteurs.