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« Il nest pas déshonorant de mourir en poursuivant un but même futile,
ce qui lest, cest de se laisser vaincre et daccepter sa défaite. »
Alexandra David-Néel
David-Nèel Alexandra
Bibliographie
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Née en 1868 à Saint-Mandé, près de Paris, décédée à Digne en 1969, Alexandra David-Néel sembarque à 23 ans pour le Sri Lanka et ne cessera dès lors de sillonner lAsie. Disciple du géographe Élisée Reclus, polyglotte, elle est tour à tour exploratrice, reporter et ethnologue au cours dune longue pérégrination qui la mène de lInde au Tibet. Ses observations sont recueillies dans une trilogie qui paraît de 1926 à 1933, et dont le premier volet, Voyage dune Parisienne à Lhassa, connaît un succès mondial. Mais son nom reste avant tout attaché à la divulgation dun système de pensée et dune spiritualité dont la profondeur se dérobait jusqualors au public occidental. Elle consacre ainsi plusieurs écrits introductions générales ou romans initiatiques au bouddhisme, parmi lesquels Le bouddhisme du Bouddha et Le lama aux cinq sagesses. Sa correspondance avec son mari, recueillie dans un Journal de voyage, restitue litinéraire dune aventurière qui, au cours dune existence centenaire, sest imposée comme lune des plus grandes dépositaires occidentales de la sagesse orientale.
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Introduction - Huit mois de pérégrinations accomplies dans des conditions inaccoutumées, à travers des régions en grande partie inexplorées ne peuvent se raconter en deux ou trois cents pages. Un véritable journal de voyage exigerait plusieurs gros volumes. Lon ne trouvera donc, ici, quun résumé des épisodes qui mont paru les plus propres à intéresser les lecteurs et à leur donner une idée des régions auxquelles je me suis mêlée de façon intime en tant que chemineau thibétain. Cette randonnée vers Lhassa sous le déguisement dune pèlerine mendiante nest, du reste, elle-même, quun épisode de longs voyages qui mont retenue en Orient pendant quatorze années successives. La genèse de ceux-ci serait hors de place dans cette introduction, toutefois, quelques explications touchant les raisons qui mont amenée à choisir un déguisement singulier pour me rendre à Lhassa me paraissent simposer.
Javais déjà fait un séjour en Asie quand, en 1910, jobtins une mission du ministère de lInstruction publique pour retourner dans lInde.
Lannée suivante, me trouvant près de Madras, jappris que le souverain du Thibet, le Dalaï-lama,
avait fui son pays alors en révolte contre la Chine et résidait dans lHimâlaya. Le Thibet ne métait pas absolument étranger.
Javais été lélève, au Collège de France, du professeur Ed. Foucaux, un savant thibétanisant, et possédais quelques notions de littérature thibétaine. On le comprend, je ne pouvais laisser échapper cette occasion unique de voir le Lama-roi et sa cour.
Être reçue par le Dalaï-lama ne paraissait pas des plus faciles, celui-ci refusait obstinément de donner audience à des femmes étrangères. Toutefois, ayant pressenti des difficultés, je métais munie de lettres dintroduction, émanant de hautes personnalités du monde bouddhiste. Ces lettres, ayant été traduites au souverain du Thibet, lintriguèrent sans doute, car il déclara immédiatement quil serait heureux de causer avec moi.
Autour du moine-souverain, je trouvai une cour étrange decclésiastiques vêtus de serge grenat sombre, satin jaune et brocart dor, qui racontaient des histoires fantastiques et parlaient dun pays de contes de fées. Bien quen les écoutant je fisse prudemment la part de lexagération orientale, je sentais instinctivement que derrière les montagnes couvertes de forêts qui se dressaient devant moi et les lointaines cimes neigeuses pointant au-dessus delles, il existait, vraiment, un pays différent de tout autre. Faut-il dire que le désir dy pénétrer sempara aussitôt de moi.
Ce fut en juin 1912 quaprès un long séjour parmi les Thibétains de lHimâlaya, je jetai un premier coup doeil sur le Thibet proprement dit. La lente montée vers les hauts cols fut un enchantement, puis, soudain, mapparut limmensité formidable des plateaux thibétains limités au lointain par une sorte de mirage estompé montrant un chaos de cimes mauves et orange coiffées de chapeaux neigeux. Quelle vision inoubliable ! Elle devait me retenir, pour toujours, sous son charme.
Laspect physique du Thibet nétait cependant pas la seule cause de lattraction que ce pays exerçait sur moi. Il mattirait grandement aussi comme orientaliste.
Je me mis à rassembler les éléments dune bibliothèque thibétaine que je désirais composer avec des ouvrages originaux ne figurant point dans les deux grandes collections du Khagyur et du Tengyur qui, comme on le sait, sont formées par des traductions. Je recherchai aussi toutes les occasions de mentretenir avec les lamas lettrés, les mystiques, les adeptes, tenus pour éminents, des doctrines ésotériques et de séjourner auprès deux.Ces investigations captivantes mamenèrent à pénétrer dans un monde mille fois plus étrange encore que les hautes solitudes du Thibet : celui des ascètes et des magiciens dont la vie sécoule cachée dans les replis des montagnes, parmi les cimes neigeuses.
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AVANT-PROPOS - Me voici au pays de Kham ! Me voici revenue en terre tibétaine !
Je me répétais cela mentalement en arrivant, passablement moulue, à Tatsienlou, à la suite dune odyssée harassante qui avait débuté dans le voisinage de la Mongolie et sétait poursuivie pendant près de deux années à travers la Chine envahie et bombardée .
Aller au Tibet oriental nentrait nullement dans les plans que javais formés en quittant la France pour retourner une fois de plus en Asie. Jaurais dû être étonnée de my retrouver, mais javais totalement perdu la faculté de létonnement. Depuis le début de la guerre sino-japonaise, les événements mavaient poussée de-ci, de-là, sans quil me fût jamais permis de diriger mes mouvements ou den prévoir les résultats.
La comparaison familière du bouchon flottant sur locéan et ballotté par les vagues paraissait tout à fait me convenir et il métait arrivé den rire en des moments que certains auraient peut-être qualifiés de tragiques.
Cependant, les vagues sétaient montrées propices au petit « bouchon pensant » que jétais ; elles mavaient généralement jetée en des endroits où les sujets dintérêt ne manquaient pas.
Ils ne manquaient certes pas à cette turbulente zone frontière où la Chine cesse dêtre purement chinoise, le Tibet dêtre purement tibétain et où, ajoutant encore à lattrait piquant de lambiance chaotique, Lolos et autres aborigènes apportent constamment leur contribution détrangeté.
En fait, comme dordinaire, au cours de mes voyages précédents, je navais rien à regretter et pouvais plutôt remercier le destin qui mavait conduite où je me trouvais.
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INTRODUCTION - Au pays des brigands-gentilshommes fait partie dune série de quatre volumes qui relatent les pérégrinations dAlexandra David-Néel au Tibet, de 1921 à 1924 et de 1937 à 1946, bien avant que ce pays ne soit sinisé. Cette première partie débute le 5 février 1921.
Depuis loccupation chinoise, en 1950, tout a changé dans cette immense contrée rayée de notre planète en tant que pays indépendant. Les Tibétains restés sur leurs hauts plateaux se sont « adaptés au modernisme » introduit par les Chinois, tout comme ceux qui, ayant suivi S.S. le XIVe dalaï-lama en exil, ont évolué au point de dire : « Même si nous retournons au Tibet très bientôt nous savons que ce ne sera plus comme avant. »
Cest donc ce Tibet, tel quil était « avant », que nous allons retrouver tout au long de ces pages évocatrices et souvent humoristiques. Lintrépide voyageuse a, il est vrai, un art tout particulier pour décrire les paysages déserts sablonneux, jungles luxuriantes, solitudes herbeuses ou humbles cahutes, hameaux vétustes, gompas fabuleuses sans parler de ces « paysages humains » quelle sait rendre si vivants
Tout ce quelle décrit, elle la vu, elle la vécu. Au cours de dix années elle a parcouru des milliers de kilomètres à dos de mules, de yaks, et le plus souvent à pied, pour faire ce quaucun Occidental navait fait avant elle, et ne fera après elle. Aussi ses études ethniques, philosophiques et religieuses constituent-elles un témoignage exceptionnel auquel on devra toujours se référer.
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PRÉFACE - Une aventurière de lesprit par Marc de Smedt - Jai vécu lélaboration de ce livre avec une joie inaccoutumée : la rencontre avec Marie Madeleine Peyronnet, qui vécut avec Alexandra David Néel les dix dernières années de sa vie, et continue à publier, à défendre et à faire connaître son uvre étonnante ; les nombreuses visites à Samten Dzong, cette maison près de la ville de Digne qui abrita lécrivain jusquà sa mort et se trouve maintenant promue Fondation ; le travail de fouille, le mot nest pas trop fort, que nous fîmes dans le bureau, les classeurs et les archives mêmes de lexploratrice ; le long et passionnant choix des textes ; toute une ambiance et des conversations évoquant sans cesse le génie disparu ; et, surtout, la redécouverte du legs que cette femme, à tous égards surprenante, laisse à lhumanité par ses livres.
Nous sommes tous appelés à disparaître, lhistoire retiendra peu de noms, peu de textes, mais le nom et luvre dAlexandra David Néel passeront à la postérité, jen suis convaincu. La vie de cette grande dame est un exemple pour les générations présentes et à venir ; ses écrits sont des témoignages uniques sur des mondes disparus. Son itinéraire et sa recherche intérieure en font légale de nos plus grands moralistes, et je la mets au rang dun Montaigne pour tout cela et pour la beauté splendide de son style.
Alexandra David Néel est à lire, à relire. Il faut conseiller sa lecture, qui nous offre la chance de partager une aventure vécue que je trouve plus prenante, plus riche, que celle dun Monfreid, dun Lawrence dArabie ou dun Kessel. Son extraordinaire destin pourrait inspirer un film à grand spectacle autant quune saga en bande dessinée.
Lépopée dAlexandra dissipe immédiatement banalités et vicissitudes brumeuses de la vie. Elle offre une leçon de courage, de curiosité et de regard, car elle sait voir. Elle na pas passé son existence à rêver, elle la prise à bras le corps, à pleines jambes, tête claire et vision lucide. Elle a voulu aller au bout de sa vérité, de ce mouvement qui la poussait en avant, ailleurs, toujours plus loin, bien au-delà de ses forces présumées, se dépassant sans cesse elle-même en un cheminement où les routes du monde se mêlent aux secrètes voies intérieures.
Voilà une femme qui, née le 24 octobre 1868 et morte le 8 septembre 1969, dans la cent unième année de son âge, sut vivre pleinement le possible : issue dun milieu bourgeois du Nord, dès lâge de quatre ans elle ressent un sentiment panthéiste envers la nature, disant dun bel arbre, dun beau coucher de soleil ou dun rocher aux formes surprenantes : « Cela est si beau que ce doit être Dieu. »
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AVANT-PROPOS - Tandis que jécrivais la présente relation de voyage, jétais loin de croire que lorsque le manuscrit en arriverait à Paris, la France serait en état de guerre. Sans doute, les présages devenaient alarmants et, depuis mon départ, en décembre 1936, les « nuées dorage » sous lesquelles je devais voyager, à travers la Chine, saccumulaient, aussi, dans le ciel de lEurope. Cependant, le doute sattardait encore dans mon esprit, comme en celui de beaucoup dautres. Nombreux étions nous, luttant contre une évidence de plus en plus marquée et nous refusant à admettre quune nouvelle explosion de démence nous ramènerait, décuplées, les horreurs de cette « Grande Guerre » qui, par comparaison avec celle qui lui succède, risque de perdre, dans lhistoire, la triste gloire du record quelle paraissait avoir établi.
Dans les circonstances actuelles, les tableaux que jai tracés, de la Chine « sous des nuées dorage » présenteront-ils encore de lintérêt pour un public tout occupé de sa propre lutte ? Je me le suis demandé et, après réflexion, jai cru pouvoir conclure quau cours des pages suivantes, mes lecteurs trouveront la matière de méditations dune réelle actualité.
Le pays dans lequel les pérégrinations souvent forcées que je relate ont été effectuées fournit un exemple frappant et profondément triste des conséquences funestes de lindifférence patriotique. Loin de moi est lidée de rééditer, à ce sujet, des phrases sonores, à la manière des tragédies cornéliennes ; la mode en est passée. Il est raisonnable denvisager le patriotisme plus sobrement et de lui rendre un caractère plus effectif en le ramenant à la mesure de lintérêt des individus. Ce nest pas, là, le faire déchoir ; jincline plutôt à croire quon lui confère ; ainsi, une valeur réelle qui le grandit.
Je ne suis pas une nouvelle venue en Chine, je lai parcourue en divers sens, pendant un grand nombre dannées et jai pu, ainsi, me familiariser parfaitement avec la mentalité de sa population. Vers 1917, causant du Tibet avec un lettré et croyant me faire lécho de ses sentiments intimes, je déplorais la défaite des Chinois battus par les Tibétains et la perte de leur suzeraineté sur Lhassa et le Tibet central. À ma grande surprise, mon interlocuteur me répondit par une sorte dallégorie : « Un homme qui possède un million de tasses ne se désole pas si on lui en vole une », me dit-il. « La Chine est vaste ; un morceau de territoire perdu compte pour bien peu dans son immensité. »
Depuis cette conversation, la Mongolie et la Mandchourie ont été détachées de la « vaste Chine », la province du Sinkiang (Turkestan chinois) sest, pratiquement, russifiée et rendue indépendante. La Chine sest considérablement rétrécie ; le nombre des « tasses » a fortement diminué tandis que leur possesseur continuait à sen désintéresser. Quand je retournai à Pékin, en 1937, je trouvai la ville et la région sétendant autour de celle-ci, saturées dinfluences japonaises. Quelques mois plus tard, la catastrophe se produisait. Ce ne sont plus des provinces lointaines, mais le cur même de la Chine, ses plus grandes villes, tous ses ports qui sont au pouvoir des envahisseurs. Nous assistons à cet événement paradoxal : une nation de trois cent cinquante millions dhommes se laissant dévorer par un pays dont la population natteint guère que le cinquième de ce chiffre.
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AVANT-PROPOS - Jai longuement hésité en fait, pendant plusieurs années avant de me décider à publier le présent livre, à cause de la nature particulièrement horrible des faits qui y sont décrits dans le chapitre V et, plus encore, dans le chapitre VI. Me trouvant de nouveau en Asie, jai eu loccasion de rencontrer, récemment, sur la Montagne sacrée aux Cinq Pics, près de la frontière mongole, des lamas tibétains qui sy étaient rendus en pèlerinage. Deux dentre eux étaient originaires du pays des Gyarongpas. Incidemment, nous en vînmes à parler de sorcellerie et des Böns, dont il existe un nombre assez considérable dans le Gyarong. Jy ai, moi-même, été témoin dun phénomène singulier dans un de leurs monastères . Ces lamas me dirent que, tandis quils connaissent beaucoup de Böns-Blancs parfaitement honorables, ils ont, aussi, entendu parler de certains Böns-Noirs qui sadonnent à de bizarres et cruelles pratiques magiques. Et, à mon grand étonnement, ils mentionnèrent la table creuse, au pesant couvercle, sous lequel on laisse des hommes introduits vivants, mourir de faim, puis se putréfier pour fournir la matière dun élixir dimmortalité. Cétait là ce que le héros de lautobiographie, que mon livre reproduit, disait avoir vu. Il nétait sans doute pas le seul à avoir contemplé ce macabre spectacle et, dans tous les cas, ce que me disaient les lamas pèlerins me forçait à conclure que des rumeurs circulaient à ce sujet, la crainte des sorciers Böns empêchant quelles sexprimassent autrement quen sourdine. Cette confirmation inopinée des confidences qui mavaient été faites à ce sujet dissipèrent mes doutes quant à lintérêt quoffrait leur publication du point de vue de léthologie.
Les circonstances dans lesquelles jai recueilli les matériaux dont je me suis servie pour écrire le présent livre sont clairement décrites dans son prologue. Sans quil soit nécessaire de len informer, le lecteur comprendra que le narrateur de cette autobiographie ne men a fourni que les données essentielles. Létat particulier desprit qui lincitait à raconter les incidents de sa vie passée exclut toute digression. Mon hôte, dominé par lémotion que lui causait le souvenir, brusquement ravivé en lui, du drame quil avait vécu, ne songeait naturellement pas à me dépeindre les lieux qui en avaient été témoins, ni à mexpliquer les murs ou les croyances auxquelles se rattachaient les faits quil racontait. Il savait quune grande partie des régions où sa vie sétait passée métait bien connue et, de plus, il me prenait pour une Tibétaine authentique.
Reproduit brièvement, tel quil ma été fait, ce récit aurait été, en bien des points inintelligible pour des étrangers à qui le Tibet et ses habitants sont totalement inconnus. Il ma donc paru préférable de donner à ce livre la forme dun roman afin de pouvoir, par des descriptions de paysages ou lexposé didées courantes dans le pays, entourer ses héros du décor physique et de latmosphère mentale dans lesquels ils se mouvaient et dont ils subissaient linfluence. Cependant, tout au long des pages suivantes, le lecteur est prié de se rappeler que ce roman a été vécu. Alexandra DAVID-NÉEL.
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PRÉFACE - Les Tibétains que nous tenons pour être des Bouddhistes, et qui se croient tels, ont adopté, comme on va le voir dans le présent livre, beaucoup de croyances et de pratiques qui diffèrent entièrement du Bouddhisme originel. Il en est ainsi de nombre de croyances empruntées à la religion des anciens habitants du Tibet, des Chamanistes.
Linfluence de Padmasambhâva le magicien sorcier, venu semble-t-il de lAfghanistan encore aujourdhui révéré comme leur Maître par les adeptes de la religion Bön, a été, et est encore grande au Tibet.
Dautre part, des érudits tel que Marpa Lotsawa, cest-à-dire, Marpa le traducteur, qui fut Maître spirituel de Milarespa, lascète poète, ont introduit au Tibet les ouvrages des grands philosophes de lInde, et aussi, les doctrines du tantrisme, principalement, empruntées au Népal. Cest un mélange qui, ajouté aux enseignements du Bouddhisme authentique : limpermanence foncière de tous les phénomènes, labsence complète dego en toutes choses que les Tibétains affirment en répétant : « Il ny a pas dego dans les individus, il ny a dego en aucune chose », forme aujourdhui les deux aspects de la religion que nous rencontrons au Tibet : la religion populaire, comme celle des intellectuels lettrés. Ainsi, certains auteurs paraissent bien inspirés en appliquant la religion prédominante au Tibet, le nom de Lamaïsme, plutôt que celui de Bouddhisme. Alexandra DAVID-NÉEL
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AVANT-PROPOS DE LA NOUVELLE ÉDITION AUGMENTÉE - Le présent livre est un document unique, le fruit dune enquête poursuivie pendant une vingtaine dannées en pays Tibétain, enquête impossible à jamais renouveler. Les contacts avec lintelligentsia religieuse du Tibet, toujours difficiles à effectuer autrefois, sont devenus irréalisables.
Les aménagements nouveaux des Pays de lAsie centrale ont livré maintes parties de leurs anciennes solitudes aux entreprises des agriculteurs et des prospecteurs. Lactivité bruyante de la civilisation moderne a déchiré le silence solennel qui enveloppait les cavernes des ermites contemplatifs et des paisibles demeures, encloses entre de hauts murs, résidences daristocratiques érudits se complaisant aux lectures prolongées et aux doctes méditations.
Les ermites, les philosophes, les penseurs et les petits groupes de disciples qui gravitaient autour deux se sont dispersés. Où les chercher ?
Ce nest pas quil ny ait plus de penseurs en Asie. Loin de là. Si quelques-uns des Maîtres spirituels dont jai recueilli les Enseignements sont morts, dautres ont surgi. Il restera toujours, et dans les différentes régions du monde, des hommes qui sefforceront de découvrir les ressorts qui mettent en mouvement les phénomènes qui apparaissent autour deux, et ceux quils perçoivent en eux ; ceux qui constituent le monde et ceux qui constituent leur personne.
Où les chercher ?
La possibilité ne soffre plus à lÉtranger de parcourir librement, comme il le pouvait autrefois, les forêts, les montagnes et tout lespace qui sétendait devant lui.
Les enquêtes du genre de celle dont ce livre est lexpression sont donc devenues, je viens de le dire, impossibles à renouveler. Ainsi, ces quelques pages peuvent-elles, à juste titre, être présentées comme un document unique, concernant les conceptions philosophiques des intellectuels bouddhistes tibétains.
Il me faut ajouter, ici, que malgré mes efforts et ma connaissance assez vaste des différentes doctrines bouddhistes, je naurais pu, sans la collaboration dévouée du Lama Yongden mon regretté fils adoptif, obtenir la confiance des Maîtres Spirituels Tibétains à qui je madressais et les amener à mexposer des vues philosophiques et des disciplines mentales quils se croyaient tenus de garder secrètes. ALEXANDRA DAVID-NÉEL
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AVANT-PROPOS - Quelques automobiles cahotantes roulent aujourdhui à travers des régions quhier encore lon ne pouvait parcourir quen palanquin ou, majestueusement, à dos déléphant à moins dêtre un négligeable piéton, et lon peut être tenté de croire quà ce changement de moyens de locomotion, ce « progrès » se manifestant par un tapage insolent de moteur et de cornet, correspond un changement analogue dans la mentalité des populations intéressées. On errerait grandement en entretenant de semblables illusions. En Orient, de nouvelles formes de véhicules, dhabitations, de vêtements ou laffectation de nouvelles façons de vivre nentament guère le fond solide, quasi immuable de la mentalité des indigènes, issue et nourrie dinfluences millénaires. Il en est ainsi partout en Asie, mais plus spécialement dans les pays reculés que leur situation géographique maintient dans lisolement. Tel est le Népal, étroitement enserré dans les replis des chaînes himalayennes, entre le Tibet et lInde. La contiguïté de sa frontière avec celle de ce dernier pays a créé, entre le Népal et lui, de nombreux et très anciens liens que la similitude de leur condition politique, sous la tutelle britannique (depuis 1816) a encore renforcé dans les Temps modernes. Linstauration dun gouvernement hindou autonome et les multiples changements dordre social qui sensuivront ne peuvent manquer davoir des répercussions au Népal. Reste à voir de quelle nature seront celles-ci. Le Népal, « rempart de lorthodoxie hindoue » comme il se plaît à se dénommer, se laissera-t-il entraîner dans le sillage de lInde en voie de « modernisation », ou bien réagira-t-il, au contraire, contre les tendances « progressistes » se manifestant à sa frontière ? Lavenir nous lapprendra, mais, quoi quil en soit, il sera impossible de bien comprendre les événements qui se produiront si lon ignore le terrain religieux et social doù ils surgiront. Un voyage au Népal, une prise de contact avec son histoire et avec sa population serviront dutile initiation à ce sujet. Le présent livre a pour but den offrir loccasion à ses lecteurs. Dans les mots sanscrits les u doivent toujours être prononcés ou. Les j, prononcés dj. Il nexiste pas de son nasal tel que in qui doit être prononcé ine.
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INTRODUCTION - Personnalité historique de Guésar. Bardes et manuscrits. Prétendus effets miraculeux des chants de lépopée. Légendes thibétaines concernant le Bouddha. La concentration de pensée envisagée comme cause déterminant la renaissance : opinions japonaise et thibétaine. Personnages figurant dans lépopée, leurs antécédents. Le Paradis de la Montagne couleur de cuivre. Le monstre Tamdrin, son origine, ses exploits, sa fin extraordinaire. Le caractère fantastique de lépopée justifiée par la croyance des Thibétains à la subjectivité du monde. Comment jai fait connaissance avec Guésar et avec son épopée. Entrevue avec un descendant du héros au château de Ling. Un barde tenu pour un parent de Guésar réincarné et un moinillon supposé être la réincarnation de son ennemi le roi de Hor. Je reçois, hors de saison, une fleur prétendument envoyée par Guésar. Une prédiction singulière qui se réalise. Le Messie guerrier des Thibétains. Traditions et prophéties concernant le retour de Guésar. Tchang Chambala, la mystérieuse cité du Nord.
Parmi les ouvrages encore très peu nombreux qui ont été traduits du thibétain, il nen existe guère appartenant à la littérature purement profane. Sans aucun doute, limportance de celle-ci ne peut, au Thibet, se comparer avec celle de la littérature philosophique et religieuse qui, outre les Écritures canoniques traduites du sanscrit, comprend aussi des milliers douvrages originaux dont les auteurs connus ou anonymes ont écrit en langue thibétaine.
Cependant, au pays des lamas, comme partout ailleurs, il existe des uvres populaires qui, bien quétant toujours empreintes de sentiments religieux car lidée religieuse domine tout au Thibet forment ce que lon peut appeler la « littérature laïque » des Thibétains.
Cette littérature comprend des productions de différents genres : histoire, légendes, poésie, géographie, voyages, et des livres techniques se rapportant à la médecine, à des calculs astronomiques et astrologiques, etc.
Il est à remarquer que les uvres de pure imagination, les « romans » nexistent pas au Thibet ou, du moins, ne figurent pas sous cette dénomination. Ce genre répugne aux Thibétains. Ce nest pas que leurs auteurs se privent dexercer leur imagination. Bien au contraire, ils accordent à celle-ci une liberté sans limites et lélément fantastique fleurit, dans leurs écrits dune façon exubérante et candide, dont nous ne retrouvons léquivalent que dans nos contes de fées. Mais tous les prodiges extravagants dont leurs récits sont parsemés, sont tenus pour avoir véritablement eu lieu, les héros des histoires pour avoir réellement vécu et lhistoire elle-même pour être authentique de bout en bout. « À quoi bon écrire ce qui nest pas vrai », me disait un Thibétain à qui jexprimais ce quétaient nos romans et le plaisir que beaucoup prennent chez nous à les lire.
Parmi cette littérature profane, quelques ouvrages sont particulièrement célèbres et le plus célèbre de tous est lépopée de Guésar de Ling, le poème épique national des Thibétains dont joffre, ici, une traduction condensée aux lecteurs français.
Il existe plusieurs versions de lhistoire fabuleuse de Guésar. Bien que très différentes, elles présentent pourtant assez de traits communs pour que J. Hackin, sappuyant sur les trois versions seules connues jusquà ce jour, ait pu déclarer que les légendes concernant ce héros « ont des origines communes ». La version, beaucoup plus étendue que les trois précédentes, que jai recueillie au Thibet oriental (pays de Kham) confirme son opinion.
Si nous considérons que cette version est la plus répandue, quelle fait en quelque sorte autorité, non seulement au pays de Kham, tenu pour être la véritable patrie du héros, mais aussi à Lhassa et dans tout le Thibet propre, elle a certains droits au titre de version officielle. Toutefois, il faut se garder de voir en elle lécho absolument fidèle de la légende primitive.
Il y a dix ou douze siècles, la saga de Guésar consistait peut-être en deux ou trois chants seulement, quavaient inspiré à des bardes anonymes des traditions éparses, concernant les exploits dun grand chef guerrier. Colportés en diverses régions, ces chants ont pu, à leur tour, y servir de base aux développements constituant les versions qui existent de nos jours.
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[b]INTRODUCTION -
Assis sur un monticule près de notre camp, tandis que nos hommes préparent le repas du soir, le Lama Yongden et moi, nous causons. Plusieurs séjours hors du pays tibétain ont déjà permis à mon fils adoptif de prendre quelque peu contact avec le monde occidental et certains livres qui sy publient, concernant le Tibet, lui sont venus entre les mains. Cest de ceux-ci quil me parle.http://www.histoireebook.com/index.php? … q-sagesses
CHAPITRE PREMIER - À travers limmensité vide des Tchang thangs un homme seul, chargé dun sac, savance à pas précipités. La nuit vient. Autour du voyageur lombre se fait plus insistante, plus opaque, lenserre insidieusement, avec une sorte de persistance agressive. Les rocs isolés, les éperons des montagnes affectent des formes insolites, inquiétantes ; tapis dans les herbages, les yeux glauques des lacs épient le sortilège nocturne. Cest lheure où les cohortes des Esprits malfaisants sortent de leurs repaires et rôdent en quête de proies. La peur rampe, progresse avec les ténèbres
Lhomme solitaire frissonne, il sest trop attardé
Haletant, il presse davantage sa marche.
Loin de là un cavalier galope à bride abattue, en proie à une terreur affolante dont la force supérieure le rend insensible à leffroi que distillent les solitudes enténébrées.
Fantoches, tous deux, que des fils mystérieux font sagiter sur la haute scène du Tibet septentrional. Cependant lhomme au sac avait atteint son but : le pied dune pente vers le milieu de laquelle une caverne encastrée dans le roc de la montagne avait été sommairement aménagée pour servir dermitage. Cet ermitage était celui dun gourou dont Munpa Dés-song recevait lenseignement spirituel en commun avec quelques autres disciples. Mais, tandis que, par une faveur spéciale, il lui était permis de vivre auprès de lanachorète pour le servir, ses condisciples devaient se contenter de brefs séjours dans son voisinage pendant les périodes dinstruction, fixées à son gré, auxquelles il les convoquait. Cest ainsi quen sa qualité de disciple-serviteur, Munpa Dés-song avait parcouru les campements y recueillant les dons de provisions que les pasteurs offraient libéralement pour la subsistance du gömpchén .
La vénération témoignée à celui-ci venait de ce quil était tenu pour le descendant spirituel dune longue lignée de Maîtres doctes en sciences secrètes, qui, tous, à mesure quils se succédaient, adoptaient le nom de leur glorieux ancêtre : Gyalwai Odzér dont lesprit croyait-on, continuait en eux, sa vie et ses uvres. Une légende fantastique était attachée à la mémoire de ce premier des Gyalwai Odzér. Cette légende, considérée comme la narration de faits absolument authentiques, navait pas dâge car nul, parmi les pasteurs du Tso Nieunpo naurait pu, même de la manière la plus vague, assigner une date à son origine.
Si connue était-elle quon se dispensait de la raconter. Tous la savaient depuis leur enfance. Elle avait pris la forme dun dogme auquel on adhère avec une foi passive et inébranlable sans jamais saviser den rechercher la provenance ou den discuter la vraisemblance. Or donc, à lépoque imprécise où cette histoire nous reportait, vivait un de ces fabuleux doubtobs dont le type atténué subsiste encore de nos jours, dans les personnes des gömpchéns et des naldjorpas vénérés et craints par les bonnes gens du Tibet.
Ce doubtob sappelait Gyalwai Odzér. Il avait commerce avec les déités et les démons dont il sattirait lappui ou quil subjuguait par des rites occultes.
Obéissant à sa voix les nâgas émergeaient des lacs aux bords desquels il sarrêtait et déposaient en hommage à ses pieds détranges offrandes empruntées aux trésors jalousement gardés dans les palais de cristal et dor situés sous les eaux des grands lacs et de locéan.
Cependant, lesprit avide de domination qui animait la forme humaine du doubtob, exigeait davantage. Un jour vint où lun des princes des profondeurs liquides incapable de résister aux injonctions magiques qui lattiraient, surgit du lac élevant vers Odzér ses deux mains réunies en forme de coupe et lui disant dun ton soumis : « Prends. »
David-Nèel Alexandra
Bibliographie suite ...
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Ils surgissent dans lesprit.
Et dans lesprit ils sengloutissent.
Milarespa.
Accompagnée de Yongden, elle sen va donc à pied, vêtue en paysanne, un revolver pendu sous une aisselle, un sac dor accroché sous une autre. Jamais or na été moins utile. Impossible de le dépenser sans perdre le bénéfice de lincognito du pèlerin, sans exciter la convoitise des brigands. Pour dormir, il faut donc quêter lhospitalité dune écurie glacée ou creuser un trou dans la neige. Pour manger, il faut donc mendier de porte en porte avec le risque de se voir offrir une friandise indésirable : des entrailles qui ont macéré dans un estomac cousu Ce soir-là, elle feint une grosse fièvre tandis que Yongden, résigné au pire, murmure : « Cest toujours votre tour dêtre malade lorsquil nous arrive un malheur. »
Par sécurité, la marche de nuit simpose, ininterrompue. Un pèlerin na pas le droit de flâner. Il faut partager le campement des pèlerins de rencontre ; elle les juge trop matérialistes, préoccupés dallumer des feux, de trouver de leau, de préparer à manger, déloigner les bêtes sauvages. Tandis quils saffairent, son regard erre vers les cimes. Elle en oublie davaler le brouet dont un compagnon de route vient de remplir son bol à aumônes. On sen étonne. Yongden doit expliquer son extase : « la mère est avec les dieux ».
Alors, elle passe pour folle ; cela accroît sa réputation de sainteté. On lui attribue des pouvoirs de Khandoma, cest-à-dire de fée : les attentions pieuses redoublent dimportunité.
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CHAPITRE PREMIER - À travers limmensité vide des Tchang thangs, un homme seul, chargé dun sac, savance à pas précipités. La nuit vient. Autour du voyageur lombre se fait plus insistante, plus opaque, lenserre insidieusement, avec une sorte de persistance agressive. Les rocs isolés, les éperons des montagnes affectent des formes insolites, inquiétantes ; tapis dans les herbages, les yeux glauques des lacs épient le sortilège nocturne. Cest lheure où les cohortes des Esprits malfaisants sortent de leurs repaires et rôdent en quête de proies.
La peur rampe, progresse avec les ténèbres
Lhomme solitaire frissonne, il sest trop attardé
Haletant, il presse davantage sa marche.
Loin de là un cavalier galope à bride abattue, en proie à une terreur affolante dont la force supérieure le rend insensible à leffroi que distillent les solitudes enténébrées.
Fantoches, tous deux, que des fils mystérieux font sagiter sur la haute scène du Tibet septentrional.
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INTRODUCTION - Le présent livre probablement le dernier que jécrirai est un document destiné, peut-être, à devenir unique, concernant un pays auquel les épithètes mystérieux et secret ont été libéralement prodiguées au cours de plusieurs siècles et qui, bientôt, va sombrer dans le domaine de la légende. Il sagit du Tibet.
Avant que les transformations qui sopèrent actuellement dans cette haute région nen aient si profondément modifié laspect physique et latmosphère mentale jusquà rendre méconnaissable son ancien visage de demeure des Dieux et de Sages supérieurs aux Dieux, il est bon, sans doute, de dresser un inventaire des idées qui y ont été élaborées. Nombre dauteurs ont décrit les formes populaires du genre particulier de Bouddhisme qui prévaut au Tibet et lont dénommé : « Lamaïsme ». Dautre part, quelques érudits ont mentionné les différentes doctrines dorigine bouddhiste dont se réclament les principales sectes tibétaines. Cependant, il est un fait sur lequel il semble que lattention na pas été suffisamment attirée et ce fait est de première importance. Un livre domine toute la littérature philosophique et religieuse du Tibet. Ce livre est la Prâjñapâramitâ attribué au philosophe indien Nâgârjuna qui vivait vers le IIe siècle de notre ère. Il consiste en une relation de discours supposés avoir été tenus par le Bouddha sentretenant avec son disciple Sariputra. Que les théories énoncées dans ces discours aient réellement été émises par le Bouddha de la façon dont elles sont présentées dans la Prâjñapâramitâ, est douteux. Elles représentent plutôt, un développement tardif de son enseignement ; toutefois, elles sont solidement basées sur celui-ci et, les Maîtres religieux tibétains déclarent quelles en sont laboutissement logique. Daprès une légende, le texte de la Prâjñapâramitâ a été confié aux déités des eaux : les nâgas pour être conservé, par eux, dans leur palais, sous locéan, en attendant que des hommes soient devenus capables den comprendre les enseignements. Par la suite, des nâgas lapportèrent à Nâgârjuna. Un épais tissu de légendes entoure la personne de cet éminent penseur. Né dans lInde méridionale, dans une famille de brahmines il fut nommé Arjuna, soit parce que sa mère le mit au monde tandis quelle se trouvait sous un arjuna , soit parce quil résidait habituellement sous un tel arbre. Nâgârjuna étudia tous les arts : lastronomie et la magie, et y devint expert. Cest ainsi quil obtint le pouvoir de se rendre invisible, grâce auquel il sauva sa vie dans une circonstance délicate. Le grand philosophe paraît avoir été quelque peu libertin dans sa jeunesse. Il sétait introduit, avec quelques amis, dans le zénanah (lappartement des femmes) dun prince. La présence des jeunes gens ayant été découverte, ceux-ci furent mis à mort. Le pouvoir dinvisibilité possédé par Nâgârjuna et le vu quil fit de se convertir et dembrasser la vie religieuse sil échappait au danger, le sauvèrent.
Fidèle au vu quil avait fait, Nâgârjuna se retira dans les Himâlayas et y apprit, dun ermite, les doctrines profondes du Mahâyâna. Ce séjour de Nâgârjuna dans les Himâlayas a une base historique.
Parmi les nombreuses légendes qui ont trait à Nâgârjuna il en est une, de caractère bizarre, que certains Tibétains tiennent pour dissimuler une signification ésotérique. La voici :
Le roi Udanaya, condisciple de Nâgârjuna chez un Maître magicien, avait obtenu de celui-ci le don de vivre aussi longtemps que Nâgârjuna. Cependant, le fils de ce roi aspirant à régner et ne le pouvant pas du vivant de son père déjà parvenu à un grand âge, alla trouver Nâgârjuna pour le prier de bien vouloir quitter notre monde. Nâgârjuna parait avoir acquiescé de bonne grâce à son désir mais aucune arme ne put réussir à le tuer. Alors, Nâgârjuna se souvint que, dans une de ses existences précédentes, il avait coupé un ver en deux avec un brin de kuça. Un brin dherbe de cette espèce placé sur son cou suffit pour détacher la tête du tronc.
Un démon emporta les deux morceaux du cadavre et les abandonna écartés lun de lautre. Par un nouveau miracle ils devinrent deux blocs de pierre qui, peu à peu, se rapprochent lun de lautre. Quand ils se réuniront Nâgârjuna ressuscitera et prêchera de nouveau, la véritable Doctrine bouddhiste au Monde qui laura oubliée.
AVANT-PROPOS - à la troisième édition. - La première édition dInitiations Lamaïques a paru il y a vingt-cinq ans, peu après la publication de Parmi les mystiques et les magiciens du Tibet (Plon). Le succès obtenu par ces deux livres qui ont été traduits en plusieurs langues étrangères montre que lindifférence affectée par la plupart de nos contemporains, quant aux questions dordre spirituel, est loin dêtre complète.
Nombreux sont ceux en qui subsiste la curiosité concernant les doctrines, dites ésotériques, enseignées par des maîtres se recommandant de traditions différentes de celles qui prédominent en Occident. Beaucoup de ces « curieux » se contentent de descriptions de rites bizarres ou de la lecture de formules dont le sens vague flatte leur latent amour du mystère. Dautres, cependant, manifestent un plus intelligent désir de recherche. Ils comprennent que tout « ésotérisme » procède dune incompréhension et que rites, symboles et déclarations énigmatiques ne sont quun voile aisé à soulever pour quiconque est animé dun puissant désir de savoir.
Les maîtres spirituels tibétains nont jamais caché ce fait et leur discipline a toujours consisté à amener leurs élèves à saisir le sens réel des enseignements qui leur sont présentés en un langage fait de rites imagés apparentés à des rébus. Depuis la publication dInitiations Lamaïques, mon regretté fils adoptif : le lama Yongden, et moi, nous sommes retournés au Tibet pour un nouveau séjour de onze années. Nous y avons pu approfondir encore davantage les conceptions des penseurs tibétains sur maints sujets dune utilité pratique pour la direction de notre conduite dans le voyage ardu de la vie. Cest ainsi que jai été amenée à ajouter aux précédentes éditions dInitiations Lamaïques, deux chapitres supplémentaires. Lun de ceux-ci, composé daprès les notes laissées par le lama Yongden, traite du rôle essentiel de lattention soutenue et de la mémoire dans la discipline spirituelle bouddhiste dont le but est lacquisition de la Connaissance.
Dans un autre chapitre sont exposées diverses théories élaborées par des penseurs tibétains, concernant la « Conscience cosmique » ou, selon une définition peut-être plus exacte, le subconscient universel perpétuellement, partout et en tout, efficient bien que son action sur notre entourage et sur nous-même demeure presque toujours insoupçonnée.
INTRODUCTION - Le but du présent livre est de fournir aux personnes qui sintéressent aux manifestations de la spiritualité orientale, des renseignements précis concernant la nature des rites initiatiques lamaïques et les doctrines exposées aux initiés, soit au cours de ces cérémonies, soit à la suite de celles-ci. Il va sans dire quun tel sujet ne peut être épuisé dans lespace de deux ou trois cents pages. De plus, pour le pénétrer complètement, il est nécessaire dêtre familier avec certaines théories du Bouddhisme mahâyâniste et du Tantrisme hindou que lon découvre sous-jacentes dans la majorité des manifestations du mysticisme lamaïque. La façon dont ces théories sont comprises, amalgamées et additionnées déléments de source non-aryenne, par les métaphysiciens et les anachorètes contemplatifs du « Pays des Neiges », peut donner lieu à un autre ouvrage. Celui-ci suffira, toutefois, à éclairer un côté très particulier et, jusquà ce jour, inconnu des étrangers, de la vie religieuse des Tibétains. Initiations lamaïques forme un tout complet et ne doit pas être considéré comme le tome second dune uvre en plusieurs volumes. Je crois pourtant devoir recommander den combiner la lecture avec celle de Mystiques et Magiciens du Tibet, et tout spécialement, de ce qui sy rapporte aux maîtres mystiques, à leurs disciples et aux méthodes dentraînement psychique pratiquées par ces derniers. Contrairement à la règle que je métais imposée dans les ouvrages précédents, afin de ne pas en alourdir le texte, jai cru bon dindiquer dans le présent livre, lorthographe de la plupart des termes tibétains, en même temps que leur prononciation dans le dialecte classique de Lhassa. Jai, dans un certain nombre de cas, donné les équivalents sanscrits des mots tibétains. Ceux-ci seront souvent mieux compris par les lecteurs qui les auront rencontrés dans les ouvrages traitant du Bouddhisme. Il ma semblé préférable domettre partout ou presque partout, le u destiné à rendre le g dur ; lon voudra bien se rappeler que dans les mots tibétains le g a le son dur devant les voyelles e et i. Lalphabet tibétain compte un plus grand nombre de lettres que lalphabet français ; pour obvier aux difficultés qui naissent de ce fait, les orientalistes emploient certains signes conventionnels quils ajoutent aux lettres de notre alphabet lorsquils transposent des textes tibétains dans notre écriture. Cette minutie technique, indispensable ailleurs, ma paru superflue ici. Elle fatiguerait, inutilement, la vue des lecteurs, leur but étant de se renseigner sur les croyances et les pratiques des Tibétains et non point dapprendre leur langue. Quant à ceux qui en ont déjà acquis une connaissance suffisante, ils seront aptes à discerner lequel des ch ou des s tibétains figurent dans les mots quils rencontreront ; ils sauront aussi que la même lettre tibétaine équivaut, selon les cas, à w ou à b, etc.
Enfin, il me reste à signaler que le titre de ce livre devrait être : Initiations et Initiés au Tibet. Ce titre ayant paru trop semblable à celui de mon précédent ouvrage, Initiations lamaïques lui a été substitué.
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PRÉFACE - Quand la faillite menace une Société commerciale, il est de règle de procéder à un inventaire minutieux de ses ressources afin de se servir delles pour conjurer la catastrophe redoutée. Une conduite analogue nest-elle pas susceptible de donner, sur un autre terrain, des résultats également profitables et la situation actuelle du monde ne justifie-t-elle pas un inventaire du capital didées dont lhumanité est propriétaire ?
Jécrivais ces lignes en 1936 dans la préface dun livre sur le Bouddhisme. Sont-elles encore dactualité ? Je nhésite pas à affirmer quelles le sont plus que jamais.
Pendant les vingt-deux ans qui se sont écoulés depuis quelles ont été publiées, une nouvelle guerre a eu lieu, bien plus dévastatrice et plus importante, quant à ses effets, que celle de 1914. Des bouleversements considérables lont accompagnée et suivie ; ils se poursuivent encore actuellement. Les conceptions sociales et morales dun grand nombre de nos contemporains se sont singulièrement modifiées. Un désarroi se traduisant par une indifférence veule ou une attente angoissée de cela qui pourrait se produire a pris possession des esprits. Est-on encore justifié en parlant de la faillite de notre civilisation, ou faut-il employer le terme de catastrophe ? Certains ny ont point manqué. Il est, cependant, une autre expression, moins dramatique, mais plus poignante, pour qualifier la situation incohérente dans laquelle se débattent aujourdhui tous les peuples se réclamant de la civilisation occidentale cest lexpression décrépitude. La décrépitude est lacheminement naturel vers la mort ; elle atteint, inéluctablement, tout ce qui a commencé et qui, par conséquent, doit finir.
De nombreuses civilisations se sont épanouies, ont brillé, puis ont disparu et nous pouvons nous représenter le temps où, comme il en est pour Ur de Chaldée, pour Babylone ou pour maintes autres cités jadis florissantes, seuls des vestiges exhumés par des archéologues indiqueront la place où sélevaient Paris, Londres ou New York.
Mais ce nest pas dans les millénaires futurs que nous vivons : cest aujourdhui, à lépoque présente. Dès lors, ne convient-il pas que nous nous efforcions décarter de nous, hommes de lépoque actuelle, le plus grand nombre possible déléments producteurs de souffrance, et de multiplier les facteurs susceptibles de contribuer à notre confort matériel et spirituel ? Or, il existe un enseignement dont le but, formellement affirmé, consiste précisément dans la Suppression de la Souffrance. Ne serait-il pas sage de lui accorder notre attention ? « Je nenseigne quune chose, ô disciples : la Souffrance et la Délivrance de la Souffrance. »
Nous voici, demblée, en face dun programme très simple, mais dune ambition éminemment pratique. Certains ne manqueront pas de le trouver dénué de lustre, de lestimer trop terre à terre, voire même vulgaire. Pourtant, ne correspond-il pas au plus ardent désir de tous les êtres ; au désir quun examen attentif nous révèle comme étant leur unique désir travesti sous mille formes : le désir du bonheur ?
À travers des routes tortueuses, des aberrations étranges, nest-ce pas notre bonheur, la suppression de cela qui nous fait souffrir, que nous cherchons ?
Bien avant léveil dun rudiment de conscience dans nos lointains ancêtres, ceux-ci, au fond des océans, y cherchaient le bien-être qui leur permettait de continuer à vivre, et la même aspiration, perpétuée tout au long des âges, habite toujours en nous. Il vaut donc la peine dexaminer cette Doctrine de la « suppression de la souffrance » qui fut proposée aux hommes, il y a vingt-cinq siècles, par un penseur né au pied des Himâlayas.
Tôt dénaturée par ceux qui lavaient entendu prêcher, cette Doctrine fut, par la suite, singulièrement développée et transformée daprès les mentalités diverses de ceux qui sen réclamaient. Sommes-nous capables den faire, aujourdhui, un usage utile ? Lexpérience peut être jugée digne dêtre tentée. Dailleurs, il nest point question de demander des directives précises à des maîtres ayant vécu il y a des siècles et dans des milieux très différents du nôtre. Chercher à les copier naboutirait quà créer des caricatures grotesques. Tout au contraire, rappeler certains préceptes fondamentaux, certaines disciplines mentales préconisées par ces maîtres, peut être profitable. Le contraste existant entre nos opinions habituelles et celles exprimées par des philosophes appartenant à dautres temps et à dautres pays que les nôtres, doit nous aider à mieux discerner ce quil y a de bon à conserver et à fortifier dans notre bagage didées et de principes et ce quil convient den rejeter. Cest là, il semble, un but excellent en lui-même et, alors même que létude, popularisée, des philosophies issues de lInde et de la Chine ne nous conduirait pas plus loin, ses services seraient, déjà, très estimables.
Le présent livre est le produit dune collaboration poursuivie pendant un grand nombre dannées, avec mon très regretté fils adoptif le lama Yongden , fidèle compagnon de mes aventureux voyages dont lassistance ma été infiniment précieuse pour recueillir, sur place, des documents concernant le Bouddhisme tibétain.
Le bref exposé que nous avons fait des théories et des méthodes du Bouddhisme est, naturellement, fort loin de comprendre la totalité de celles-ci. Limmense littérature bouddhique qui, en plus de très nombreux ouvrages canoniques, comprend des milliers de commentaires et de traités philosophiques dus à des auteurs chinois, tibétains, japonais, et non classés dans les collections canoniques, ne peut pas être résumée en quelques centaines de pages. Mon collaborateur et moi navons eu pour but que de renseigner les lecteurs sur les particularités essentielles, ou les plus saillantes, des théories bouddhiques et des méthodes de culture mentale qui en découlent. Familiarisés avec celles-ci, ils seront capables, si le sujet les intéresse, détudier, avec fruit, les ouvrages beaucoup plus techniques que dérudits orientalistes ont consacrés à lexamen, séparé, de différentes doctrines du Bouddhisme ou à certaines phases de son développement philosophique.