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Eugène Terre'Blanche
Donnez un marteau
« Donnez un marteau à un Blanc, il bâtira une civilisation.
Donnez un marteau à un Jaune, il fabriquera dautres marteaux.
Donnez un marteau à un Arabe, il battra sa femme avec.
Donnez un marteau à un gay, il se lenfoncera dans le rectum.
Donnez un marteau à un Noir, il tuera des Blancs avec.
Donnez un marteau à un Juif, il le donnera au Noir. »
Le noble inconnu
http://news.book.co.za/blog/2010/04/06/ … ust-listen
Eugène Terre'Blanche
Cette chanson en langue afrikaans a causé un séisme politique à sa sortie en Afrique du Sud. Composée par Sean Else et Johan Vorster, elle est chantée par Bok van Blerk. Elle est tirée de lalbum Jy praat nog steeds my taal (mars 2006), ressorti sous le titre de sa chanson principale «De La Rey» en septembre 2006.
Disque de platine en 2007, la chanson est un hommage au général boer Koos de la Rey (1847-1914), qui sétait opposé à la guerre avec les Britanniques en 1899 parce quil pensait que les républiques boers ne pourraient pas la gagner et y perdraient leur liberté. Une fois la guerre commencée, De La Rey sétait loyalement engagé dans la bataille avec un héroïsme reconnu et avait battu les Britanniques lors de la bataille de Magersfontein.
Le succès foudroyant de la chanson a causé la surprise générale. Ses paroles éveillent un écho profond chez les Afrikaners qui se sentent menacés dans leur identité et exclus de la nouvelle Afrique du Sud. Lors dun concert donné par Bok van Blerk au stade Loftus Verveld de Pretoria en 2006, plus de 22.000 spectateurs ont repris le refrain avec le chanteur. Le chant est repris par les jeunes Afrikaners lors des concerts et des rencontres sportives, et joue quasiment le rôle dun nouvel hymne national afrikaner. Le chant du cygne pour la dernière tribu blanche dAfrique ?
Les livres pour en apprendre plus :
Les Français au Transvaal (1.35 MB)
M. Hugo - Rapport - Mission commercial au Transvaal (12.34 MB)
Arthur Le Creps - Guerre de l'Angleterre contre les Boërs (769.41 MB)
Last edited by MimilleLaBordille (13-04-2010 12:10:43)
Eugène Terre'Blanche est mort, salement mort. Les assassins veulent le tuer deux fois en le faisant passer pour une fiotte.
L'article est un formidable réquisitoire en faveur de la désinformation ou plutôt la formation d'une forme pensée contre cet homme. La défense des assassins est simple, on se tape l'ancien et on le trucide avec la joie des noirs qui se vengent des blancs pour cause de racisme envers la victime.
D'ailleurs cela devait être une force de la nature, un bandeur de première, un as de la balayette infernale ; rendez-vous compte, Eugène voulait se les taper tout les deux.
Et si victime de ces deux assassins qui selon la tradition et la coutume du coin l'on rituellement mis à mort en lui faisant subir les outrages.
Ou une mise en scène pour que son assassinat soit masqué ?
Eugène Terre'Blanche assassiné pour une tentative de sodomie ? ; Voilà les gros titres des merdias aux ordres.
ENQUETE - Les employés de l'extrémiste blanc sud africain affirment que le motif du meurtre est sexuel...
Rebondissement dans laffaire TerreBlanche en Afrique du Sud. Lun des deux employés noirs du leader extrémiste afrikaner inculpés du meurtre a affirmé à son avocat que cest «un acte de sodomie en cours» qui a provoqué lassassinat.
Selon lavocat de Chris Mahlangu, le plus vieux des suspects, âgé de 28 ans, son client a déclaré quEugène TerreBlanche a été tué parce quil voulait avoir des relations sexuelles avec lui. Les deux accusés plaideront donc la légitime défense.
Eugène Terre'Blanche a essayé de les faire boire
Mais si l'avocat de Chris Mahlangu assure qu'Eugène Terre'Blanche a essayé de faire boire les deux hommes avant d'agresser sexuellement «ou ou les deux», son confrère refuse d'entrer dans les détails. Son client étant un mineur de 15 ans, il a annoncé qu'il révèlera ce que son client lui a décrit «pendant le procès».
«Quelque chose de choquant a eu lieu le jour du crime», a-t-il cependant admis dans la presse sud africaine. Et son client «a subi tous les tests nécessaires pour soutenir (s)es arguments», a ajouté l'avocat.
Les vêtements des suspects analysés.
La police sud-africaine semble prendre cette piste au sérieux, et enquête à ce sujet. Les vêtements des suspects vont notamment être analysés. Une autre piste mène à un conflit liés au salaire des deux jeune ouvriers agricoles.
Mais du côté de l'AWB (Afrikaner Weerstandsbeweging, Mouvement de résistance afrikaner dont Eugène TerreBlanche était le leader), on refuse de croire à la thèse sexuelle et la piste raciale et politique reste privilégiée. Selon le procureur, Eugène Terre'Blanche a cependant été retrouvé sur son lit, le pantalon baissé au niveau des genoux.
Les deux hommes doivent comparaître mercredi devant le tribunal de Ventersdorp pour une audience de procédure au cours de laquelle ils pourront demander une remise en liberté sous caution.
Le saviez-vous ?
Les premiers camps de concentration furent établis en Afrique du Sud.
Devinez par qui ?
http://www.youtube.com/watch?v=2adfNGu1UR4
La découverte de l'or en 1886 sur les plateaux du Witwatersrand, en plein cur des domaines boers, attire bientôt des immigrants de toutes origines et excite la convoitise des Anglais. Une ville minière naît à la vitesse d'un champignon : Johannesbourg. Elle ne tardera pas à devenir la métropole économique de l'Afrique du Sud.
À l'affût d'un prétexte pour en finir avec les Boers, le premier ministre de la province du Cap, Cecil Rhodes, dénonce les traitements discriminatoires que subissent les Anglais et les autres étrangers (Uitlanders en afrikaans) installés au Transvaal.
Cecil Rhodes, né en 1853, débarqué en Afrique du Sud pour raisons de santé, a fait fortune en rachetant les parcelles de petits chercheurs de diamants. Député du Cap puis premier ministre de la colonie, il rêve de constituer une Afrique britannique du Caire au Cap ! Après l'éviction des Anglais du Transvaal, il a pris sa revanche en contournant les républiques boers par le nord. Il a imposé le protectorat britannique au Bechuanaland (aujourd'hui le Botswana) et fondé deux colonies dans le bassin du Zambèze, appelées en toute modestie Rhodésie du Sud (aujourd'hui Zimbabwe) et Rhodésie du Nord (aujourd'hui Zambie).
Contre les Boers, le général Kitchener fait usage d'une invention récente, le fil de fer barbelé, pour aménager des camps de concentration (les Espagnols, quelques années plus tôt, à Cuba, avaient créé les premiers camps de l'Histoire de l'humanité).
Les barbelés permettent d'emprisonner un grand nombre de personnes à moindres frais et avec une surveillance réduite. 200.000 Boers (hommes, femmes et enfants) sont de la sorte internés dans des conditions lamentables et l'on compte à certaines périodes un décès sur dix parmi les internés. Les Boers évaluent à près de 30.000 le nombre de victimes des camps.
Dénoncée par l'Anglaise Emily Hobhouse, vilipendée par l'opinion internationale et surtout britannique, l'armée de Sa Majesté renoncera ultérieurement à ces pratiques.
Les Anglais soumettent enfin les Boers au prix d'une victoire à la Pyrrhus.
La plus grande guerre coloniale de l'ère moderne, qui a opposé deux peuples d'origine européenne, se solde par 7.000 morts sur un total de 100.000 combattants boers (non compris les victimes civiles des camps de concentration) et par... 22.000 morts dans les troupes britanniques, pas moins de 500.000 hommes ayant été engagés par Londres dans le conflit !
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Camp de concentration boer vers 1900
Ces camps furent au départ installés pour héberger les réfugiés dont les fermes avaient été détruites au cours des combats. Le terme de « camp de concentration » n'avait pas à l'origine de sens négatif, car il s'agissait simplement d'un camp où les réfugiés étaient concentrés. Cependant, suite aux instructions de Kitchener, ils furent rapidement nombreux à être construits et convertis en prisons.
Il y eut au total 45 camps de tentes construits pour les Boers et 64 autres pour des Africains noirs. Les camps de Boers abritaient essentiellement des personnes âgées, des femmes et des enfants pour un total d'environ 120 000 personnes. 25 630 d'entre eux furent envoyés à l'étranger. Mais les camps pour les Africains noirs comptaient également de nombreux hommes. Même après avoir été forcés d'évacuer les territoires boers, les Africains noirs ne furent pas considérés comme hostiles aux Britanniques et servirent de main d'uvre salariée. Des camps de détentions furent également installés aux Bermudes, en Inde, à Sainte-Hélène et à Ceylan.
Les conditions de vie dans ces camps étaient particulièrement insalubres et les rations alimentaires réduites. Les épouses et les enfants de soldats combattants se voyaient de plus imposer de plus faibles rations. Le régime alimentaire pauvre et le manque d'hygiène furent à l'origine de l'apparition de maladies contagieuses telles la rougeole, la fièvre typhoïde et la dysenterie. Combinée avec des manques en matériel et fournitures médicales, la situation provoqua de nombreux décès un rapport postérieur à la guerre estima à 27 927 le nombre de Boers décédés (desquels 22 074 enfants de moins de 16 ans) et 14 154 Africains noirs, morts de famine, de maladies et d'exposition au soleil. En tout, environ 25 % des Boers et 12 % des Africains noirs moururent (des recherches récentes suggèrent une sous-estimation des pertes africaines, qui se monteraient en fait à environ 20 000 victimes).
Emily Hobhouse
Une déléguée du Fonds Sud-Africain pour la Détresse des Femmes et des Enfants, Emily Hobhouse, fit beaucoup pour les détenus à leur retour du Royaume-Uni, après avoir visité des camps dans l'État libre d'Orange. Son rapport de quinze pages suscita l'indignation, et conduisit à l'envoi d'une commission gouvernementale, la Commission Fawcett, qui visita les camps d'août à décembre 1901 et confirma les faits mentionnés dans le rapport. La commission fut extrêmement critique à l'égard des camps et formula de nombreuses recommandations, telles que l'amélioration du régime alimentaire et des équipements médicaux.
En février 1902, le taux de mortalité annuel tomba de 6,9 % à 2 %.
Que dire d'autre ....
Si merci à Toi traducteur john Doe pour tes traductions.
British Jews and the Boer war
British Jews and the Boer war.pdf (72 Ko)
https://mega.co.nz/#!2B1w1ZoI!AhbvhWzAH … oL9bf6mHh0
Offline
LAFRIQUE EN SLIP
(IMAGES DE LAFRIQUE POST-COLONIALE)
Edition revue et augmentée par Lenculus au format PDF :
http://www.balderexlibris.com/index.php … ue-en-slip
http://www.histoireebook.com/index.php? … ue-en-slip
http://www.the-savoisien.com/wawa-consp … hp?id=2415
http://rvrsn.wordpress.com/lafrique-en- … -coloniale
Le 1er janvier 2001, Alexandre Poussin et son épouse Sonia commencèrent leur long périple à travers lAfrique. Ils avaient en effet décidé de traverser à pied tout le continent, du Sud au Nord, en partant du Cap de Bonne-Espérance, en Afrique du Sud. Pendant trois ans, sur plus de 14 000 kilomètres, seuls, sans sponsor ni logistique, ils ont traversé tous les pays de lAfrique de lEst, jusquen Égypte dans les pas de lHomme avant de terminer leur voyage au lac de Tibériade, là où, selon les géographes, se termine la grande fracture du Rift africain. Le récit de leurs aventures a été publié sous le titre Africa Trek, en deux volumes, et a connu un important succès de librairie, avec plus de 130 000 exemplaires vendus.
Alexandre et Sonia Poussin ont été accueillis, nourris et hébergés quasi quotidiennement par de bonnes âmes, de toutes races, de toutes cultures, de toutes religions. Ils en sont sortis amoureux de lAfrique. Mais leur livre, Africa Trek, montre aussi crûment certaines réalités que lon ne voit jamais dans les documentaires qui passent à la télévision et qui ne sont jamais évoquées par les militants tiers-mondistes, toujours prompts à accuser les autres des malheurs du continent.
Nous avons donc décidé de recopier certains passages éloquents de ce livre (les titres de chapitres sont de nous), afin que chacun puisse se faire une idée de ce que peut être lAfrique, observée de près ; loin, donc, très loin du discours venimeux des intellectuels cosmopolites.
Hervé RYSSEN
La nouvelle Afrique du Sud antiraciste
Afrique du Sud, au 63ème jour de marche. Alexandre et Sonia sont prévenus par un fermier : Vous entrez dans des régions où il ny a ni justice, ni police. Tout peut arriver. Il y a quelques années, trois types ont tué mon cousin dune balle dans la tête sous mes yeux. On venait de les surprendre en train de violer sa fiancée Beaucoup de fermes isolées se font attaquer : nous sommes des proies faciles. Depuis, jai toujours sur moi un petit Beretta.
Ce fermier na pourtant rien dun militant radical : Nous avons été les premiers à crier de joie quand Vervoed a été assassiné au Parlement par un Grec [lidéologue et inspirateur de lapartheid, le régime de séparation des Noirs et des Blancs qui a eu cours jusquen 1992] Vous imaginiez en Europe que nous étions tous racistes ? Même si nous lavions voulu, nous naurions pas pu lêtre. Quand nous étions injustes et que nous nous comportions mal avec nos gens, nous nous réveillions avec la moitié de notre cheptel décapité Pendant lapartheid, nous nous occupions de nos employés, nous leur procurions des habits, nous les emmenions chez le médecin, nous nous occupions de leurs écoles, nous les logions, chaque année, nous les emmenions au bord de la mer. Cétait très paternaliste, mais tout le monde était content. Pas de criminalité ou de problème de violence et de racisme, tout le monde vivait heureux sur la ferme. Aujourdhui, ils nont plus rien Est-ce que vous voudriez aller vous entasser dans ces horribles cases alignées hors des villes, ces nouveaux ghettos que le gouvernement leur construit sans leur donner le moindre espoir de travail ? Quant à moi, je ne peux pas quitter cette ferme. Dès que je men vais, il y a un drame : on est cambriolé par les ouvriers des voisins, ils sentretuent. La semaine dernière, nous sommes partis un vendredi soir pour un mariage à Grahamstown, et au retour, une de mes ouvrières avait défoncé le crâne de son mari avec une brique. Cest pas de lidéologie, ça, cest du réel ! Et qui a fait cinq heures de route pour le conduire à lhôpital de Port Elizabeth ? Qui a payé lopération ? Quest-ce que je vais raconter à mon assureur ? Quil est tombé du tracteur ? Si je ne fais pas ça, ils vont tous témoigner et dire que cest moi qui ai donné le coup de brique. Qui va-t-on croire ? Depuis, mon gars est en arrêt de travail, mais sa femme est quand même venue chercher son salaire. Je vous le dis, nous marchons sur des ufs ici, et quon ne vienne pas nous dire que nous sommes racistes, ce sont des grands mots des gens de la ville. Moi, jai été élevé avec ces gens, nourri au sein de ma nounou, jai appris le xhosa avant langlais, je fais davantage partie de leur famille que de celle des donneurs de leçons qui se gargarise dantiracisme mais qui sont verts quand leur fille épouse un Noir.
Une bonne récolte
Dans la ferme suivante, vingt kilomètres plus loin, Alexandre et Sonia entendent ce discours, de la part dun fermier lui aussi anti-apartheid :
Je vais vous raconter une histoire qui mest arrivée lannée dernière : depuis la fin de lapartheid, nous avons eu le droit daller à nouveau dans les bantoustans, notamment dans le Transkei, même si cest extrêmement dangereux. Cest une terre agricole très riche, qui était très prospère avant davoir été attribuée aux Xhosas. Et pourtant, rien nen sort aujourdhui. Il y a deux ans, notre syndicat de fermiers y est retourné bénévolement afin de proposer des conseils et des techniques aux fermiers locaux. Nous avons été reçus comme des sauveurs, ils navaient jamais vu le moindre représentant du ministère de lAgriculture ! Nous avons mis ensemble un projet au point : nous leur avons donné gratuitement de lengrais pour un an ; nous avons ensemencé en leur apprenant comment procéder et on sest entendus sur le fait quen cas de bons résultats, lannée suivante, ils nous achèteraient de lengrais avec une petite partie du fruit de leur récolte. Tout sest bien passé ; est arrivé le temps des moissons, la récolte a été mirifique. Nous avons fêté ça comme ils savent si bien le faire ! Je vous montrerai des photos. Lannée daprès, nous avons attendu, attendu : la commande dengrais ne venait pas Inquiets, nous sommes allés les voir. (Je vous rappelle quil ny a pas de téléphones là-bas, chaque fois il fallait six heures de voiture en convoi !) Et nous leur avons demandé ce qui nallait pas, sils nétaient pas contents. Savez-vous ce quils nous ont répondu ? Oh si ! très contents ! Mais la récolte était si importante quon na pas tout écoulé, il nous en reste pour cette année, pas besoin de planter ! Vous voyez que ça va prendre du temps ! Cela nous a coûté cher, cette petite histoire, mais bon, nous ne regrettons rien.
Des barreaux aux fenêtres, cest mieux
Le 25 mars 2001, après le 1405ème kilomètre. En arrivant à Flaukraal, un carrefour perdu au-delà de Jamestown, un policier armé nous arrête : Quel diable vous amène dans les parages, Vous ne savez pas que des commandos mènent une battue dans toute la région ? Un jeune couple de fermiers vient dêtre massacré après les pires tortures. Accrochés aux toilettes, les yeux arrachés à la petite cuiller, du sang jusquau plafond, et je vous épargne les détails. Vous êtes passés devant chez eux à Olivierskloof !
Je me souviens du panneau. Nous avions failli aller demander de leau car la maison était visible de la piste ? Voyant quil nous a secoués, Wilhelm Waagenaar, presque désolé, nous invite chez lui Regardez mes statistiques : avant 1994, une moyenne de soixante crimes par an sur mon seul district, depuis, regardez la courbe ! De quatre-vingt-dix à cent quarante-sept. En rentrant, il embrasse sa femme et son nouveau-né, et va aussitôt tirer les rideaux. Comme toutes les maisons du pays, ils ont dû récemment équiper les fenêtres de barreaux. Tout en verrouillant les issues, il explique : Je ne peux même pas quitter mon arme de service. On se cache derrière les rideaux car ils nous tirent la nuit comme des lapins à travers les vitres. Cest encore arrivé la semaine dernière près de Jamestown à une vieille femme isolée. Regardez comme on est obligé de se barricader ! Je ne sais pas si vous êtes au courant, mais depuis 1991, notre pays a connu mille cinq cents attaques de fermes qui se sont soldées par mille huit cents morts, et ça sintensifie ! Depuis 1998, neuf cent vingt-sept fermiers [blancs] ont été massacrés : et ils ne font pas de quartier, tout le monde y passe, les femmes, les enfants, les ouvriers agricoles Ça vous en bouche un coin, hein ? On ne vous raconte pas ça dans les journaux, en Europe. Ça ferait désordre dans cette nouvelle Afrique du Sud où tout le monde il est beau, tout le monde il est gentil ! Limage de la Rainbow Nation en pâtirait ! Et que neuf cent vingt-sept victimes, cest toujours beaucoup moins que les crimes des Noirs entre eux.
Discrimination anti-Blancs
108ème jour de marche. Un autre fermier blanc, Wynne, les accueille : Beaucoup de jeunes diplômés ne trouvent plus aussi facilement de travail car les places sont attribuées doffice à des Noirs qui nont pas eu la chance de faire autant détudes, ou bien certains cadres supérieurs ont du mal à vivre le fait dêtre rétrogradés et remplacés par un bénéficiaire de lAffirmative Action moins compétent. Dans dautres cas, les sociétés doivent avoir des quotas de Noirs et de Coloreds, ce qui conduit à des licenciements Pour ne pas perturber leurs organigrammes ou sécuriser des postes, beaucoup de boîtes préfèrent payer le salaire du Noir en question, mais lui demandent de partir en vacances permanentes. En tout cas, je nai jamais vu un investisseur noir racheter une terre pour y mettre des fermiers noirs dessus. Il y a plein de beaux messieurs maintenant dans les villes, avec de belles maisons et des voitures quon ne pourra jamais soffrir, mais pas un pour acheter une ferme, alors quil y a trente-cinq fermes à vendre dans le district.
Attaché tout nu à un radiateur
4 juin 2001, 155e jour de marche, 2472ème kilomètre. Le sport national, apprend-on, est le vol de voiture à main armé. Plus dune centaine de morts par jour.
Parfois, lhospitalité des fermiers est très éprouvante. Et lon songe quon préférerait planter la tente tranquillement dans la forêt, loin des carnages et des réalités Sa maison perdue en plein bois est claquemurées derrière de hauts grillages. Dans le jardin, deux boerebulls, sorte de mâtins de Naples mâtinés de mastiffs, sont à cran.
Je ne me fais pas dillusions sur leur utilité. Ils sont juste-là pour se faire tuer avant nous, le temps quon sorte les fusils du coffre.
Sur le palier, un petit homme tremblant, les doigts jaunis de nicotine, nous accueille.
Cest mon beau-frère, Gerd Klaasen. Ne lui en veuillez-pas, il a perdu un peu la tête. Il y a six mois, il est resté deux jours attaché tout nu à un radiateur avec un pistolet sur la tempe !
Welcome ! Welcome !
Gerd coupe court à mes divagations.
Ce nétait pas une vengeance : cétait de la pure barbarie. Jai payé pour un crime que je nai pas commis. Pendant lapartheid, je tenais la seule boucherie de Volksrust dans laquelle il ny avait quune seule caisse et une seule file dattente (une loi stipulait que les Blancs et les Noirs ne pouvaient pas être servis au même comptoir). Je perdais beaucoup de clients blancs à cause de ça. Mais moi, cétait mes principes : sous la peau, la viande est rouge chez tout le monde. Là, ils ne voulaient pas simplement me voler, ils savaient que javais ma caisse. Ils mont torturé gratuitement. Introduit des choses là où je pense, battu, uriné dessus. En partant, le type ma dit : Je ne te tue pas pour que tu vives avec ce souvenir. Quand jai entendu ma voiture sen aller, cétait la plus belle musique de ma vie ! Depuis, jai ces pneus qui crissent en permanence dans ma tête. Le pire, cest que je lui ai pardonné. Je le plains de vivre avec autant de haine.
Koos Oosthuizen explique à son tour : Cest comme ce qui est arrivé au vieux Scheepert En 1999, ce vieil ami sest fait massacrer avec sa femme dans sa ferme. Le contremaître a dit les avoir entendus crier toute la nuit comme des cochons. Il était tellement pétrifié quil na pas bougé ! Le lendemain, il a découvert le carnage. Les vieux étaient écorchés vifs, Petra violée par les cinq ordures, les ongles arrachés, et jen passe Une vieille dame de soixante-dix ans ! Cest pas monstrueux ? Elle est belle, la nouvelle Afrique du Sud !
Hauts barbelés électrifiés
11 juin : Nous profitons de notre présence à Johannesbourg pour nous aventurer dans les ghettos noirs qui entourent la ville. Lancien cur financier tout hérissé de gratte-ciel a été totalement déserté par les Blancs. Lespace semble avoir été investi par tous les déshérités dAfrique. Une forte immigration nigériane et mozambicaine en a fait, la nuit, une zone de non-droit qui contribue à la mauvaise réputation du pays. Toute la richesse, les sièges dentreprises, les bourgeois, les centre commerciaux et de loisirs, léconomie, tout sest déplacé vers le nord à Sandton. Là, tout est flambant neuf, aseptisé, et tout le monde se protège derrière de hauts barbelés électrifiés La frustration des Noirs est à la hauteur de leur désillusion. En conquérant le centre daffaires, ils ne sappropriaient pas les richesses, ils les faisaient fuir La nuit, le cur de Joburg résonne de coups de feu, symphonie de crissements de pneus et de bris de vitrine.
Joies africaines
18 juillet 2001, parc national Kruger : Nous rencontrons Bruce Lawson, trapu, dégarni, le sourire dacier du petit filou sympathique. Il a lui aussi traversé lAfrique, en 1997, en partant avec deux amis du Cap de Bonne-Espérance pour rejoindre le Caire, à pied, sans assistance. Il nous montre son diaporama. Trop chargés, affaiblis par huit crises de malaria, à court de ressources, aux prises avec un refus des autorités éthiopiennes de les laisser sortir du pays, ils renoncèrent à la frontière soudanaise, après avoir marché près de dix mille kilomètres. Sur leur liste noire : une cheville fracturée au Zimbabwe, un nez cassé par un coup de poing au Mozambique, des marches forcées de nuit au Malawi pour échapper au harcèlement de la population et à la chaleur, un mois dinondation à patauger en Tanzanie, une course poursuite à la mitraillette dans un désert kenyan au cours de laquelle ils perdirent lintégralité de leur matériel, de constants jets de pierres de la part des gamins éthiopiens, et le coup de crosse fatal dun militaire qui déchira loreille de Bruce et mit un terme à lexpédition Au fil des diapos se dessine une Afrique pauvre et pouilleuse, plate et chaude, dangereuse et hostile, insalubre et ennuyeuse.
La gabegie arc-en-ciel
Plus rien de ce qui est géré par le gouvernement ne fonctionne : poste, télécommunications, transports, hôpitaux, police, justice. Seule léducation nest pas en faillite totale La situation sest considérablement dégradée depuis 1994 Dans la communication, les lignes téléphoniques en cuivre sont systématiquement arrachées pour être revendues par les pauvres de ghettos. Le réseau est foutu ! Cest pour cela que notre pays a connu la plus forte croissance au monde des téléphones mobiles et que nous sommes en pointe dans ce domaine. Dans les transports, les Noirs sentassent dans des tombeaux roulants et se livrent à des guerres de gangs, les Blancs et les nantis ne se déplacent plus quen compagnies privées. Plus de lignes dautobus régulières, plus de trains de passagers. Les hôpitaux sont des mouroirs démunis de tout, les cliniques privées se multiplient. 65 % de leurs clients sont dailleurs des Noirs. Pour rien au monde ils niraient se faire soigner dans des hôpitaux gouvernementaux. La police est défaillante, notre secteur dactivité le plus florissant est celui des groupes de surveillance et des milices de sécurité, sans parler des mafias et des gangs qui font la loi dans les ghettos. Idem pour la justice : les gens commencent à se faire justice eux-mêmes. Il ny a jamais eu autant de lynchages, de vengeances et de crimes racistes, mais ils sont Noir contre un Noir ou Noir contre un Blanc, alors ça nintéresse personne.
La nouvelle police antiraciste
Dans le parc national sud-africain, ils sont accueillis pas Brian Jones : Vous marchez comme deux idéalistes. Cest mignon, certes. Mais un jeune couple de touristes néerlandais sest fait égorger la semaine dernière à cinq kilomètres dici. Ils ont dabord violé la fille devant le type, juste pour le plaisir. Jamais je ne laisserais faire à ma fille ce que vous faîtes ! Soyez toujours prêt au pire. Moi-même, je suis un rescapé. Il y a trois ans, une bande est descendue de Bushbuck Ridge pour nous piller en plein jour. Sans sommations ils mont perforé de trois balles à travers le torse Me croyant mort, ils sen sont pris à ma femme en la traînant par les cheveux jusquau coffre. Elle la ouvert, il ny avait que des armes à lintérieur. Ils commençaient à sen prendre à ma fille quand un des salauds a découvert que je nétais plus là. Dans un semi-coma, je métais traîné chez le voisin. Pendant ce temps-là, mes travailleurs noirs ont rappliqué et cerné la maison avec des haches, des faux, des pioches. Mon contremaître sest pris une balle dans la cuisse. Les autres menaçaient de faire sauter la cervelle de ma femme et de ma fille. Au même moment, je mévertuais en pissant le sang à appeler la police de chez le voisin : ils me raccrochaient au nez dès que je parlais dattaque. Il a fallu que je les menace, jétais en plein cauchemar. Au bout de deux heures, mes ouvriers ont compris quil fallait quils laissent partir les tueurs. Les flics sont arrivés six heures après les faits ! Depuis, je suis en procès car la justice, suite à la loi sur la disparition des armes référencées, me réclame une fortune parce que je me suis fait voler mes fusils. Je vous le dis, on vit dans un pays submergé par un déluge de crimes et de mort !
Attention, cimetière dangereux
Mardi 14 août. À Duiwelskloof, juste avant de remonter sur lescarpement du haut veld, cest un corbillard qui sarrête à notre hauteur. Son chauffeur se nomme Joey Schambriel : Pour les Blancs, je ne fais plus denterrements. Ils veulent tous être incinérés.
Pourquoi ? interroge Sonia. Les cimetières sont profanés ?
Pas du tous ! Les morts ne risquent rien. Cest plutôt parce que les cimetières sont devenus trop dangereux pour les vivants. One ne compte plus les viols et les meurtres perpétrés sur les tombes que les victimes étaient venues visiter. Alors mes clients préfèrent les urnes protégées dans les funérariums On ne vous raconte pas ça en France.
Paint it white
Vous avez vu le week-end dernier, cette image qui a fait le tour du monde ; cette petite Sud-Africaine victime dun affreux crime raciste et vexatoire : peinte en blanc parce quelle avait volé, à Louis Trichardt, dans une épicerie tenue par des Blancs. Humiliée, avilie, parce quelle avait faim, a dit le journaliste de CNN. Ce quil a oublié de préciser, cest que la tenancière blanche nétait pas là, que ce sont ses employés noirs qui lont fait, que la petite était récidiviste, et que cest une tradition venda de peindre les voleurs de pigment blanc afin que tout le monde le sache et quils ne recommencent pas ! En revanche, jai inhumé sept fermiers assassinés cette année.
Zimbabwe : des léopards en pagaille
Sur la protection de la nature et des animaux, maintenant. Voici Pierre et Rosette Émeric, les deux seuls Français du Zimbabwe. Pierre est une sorte de Raimu colonial, en plus jovial. Il vient de la République centrafricaine mais a été invité à sinstaller ici par le pouvoir pour relancer une réserve de chasse. Il bénéficie de la protection diplomatique française.
Je me suis fait envahir trois fois, et chaque fois, larmée est venue déloger les war vets. Ces gens-là ne désirent pas la terre, ils veulent mon gibier et surtout foutre dehors les Blancs. Quand je suis arrivé il y a cinq ans, il ny avait plus un seul animal sur mes soixante-dix mille hectares, le précédent propriétaire les avait tout abattus pour rembourser ses dettes. Eh bien, figurez-vous quen cinq ans, sans rien faire, sans réintroduire une seule bête, jai plus de mille élands, mille koudous, six cents girafes et des léopards en pagaille. Jai seulement creusé dix-sept puits profonds et installé des pompes pour créer des points deau. Les animaux sont venus par osmose, pour combler le vide laissé et pour fuir les massacres alentour. Ici, ils se sentent en sécurité. Nous ne prélevons que les trophées. Cette année, je nai eu pour linstant que cinq clients. Ils nont tiré quune douzaine de têtes. Si jétais envahi, tous mes animaux disparaîtraient en six mois.
Avant de nous coucher, Rosette nous glisse une dernière recommandation :
Nouvrez pas votre porte fenêtre, nallez pas non plus admirez la lune dans le jardin car la nuit, nous lâchons trois guépards autour de la maison.
Un écosystème ravagé
Au petit déjeuner, Pierre nous apporte un album de photos.
Je suis en train de constituer un dossier sur le braconnage pour plusieurs instances internationales. Mes voisins ont presque tout perdu Tenez, là, un zèbre dont ils nont pris quun cuissot arrière car ils ne pouvaient pas emporter le reste Ici une girafe dont ils nont pris que la queue : sûrement une commande de sorcier. Des élands, des koudous : là, ils prennent tout, ils ne laissent que la tête Et là, ce gros lapin dépiauté est un léopard, ils gardent la fourrure et ne touchent pas à la viande. Le carnage et les écorchés défilent sous nos yeux.
Le pire, cest peut-être les feux. Ils ravagent un écosystème à très lente régénération. Les animaux ne pourront plus jamais revenir si la brousse est détruite. Les envahisseurs mettent systématiquement le feu pour déprécier les propriétés et pour rabattre le gibier dans leur filet. De toute façon, le Zanu-PF leur a demandé de défricher, et cest plus facile de foutre le feu que de prendre une hache ! Ce quils ne savent pas, cest quils ne pourront jamais planter quoi que ce soit ici. Avant les années 1960 et les premières réserves de chasse, cétait un désert. Il ny avait personne ici, aucune tribu. Le pouvoir leur raconte et leur promet nimporte quoi.
Moi je vous le dis, ils ne planteront rien
Quelques jours plus tard : Wilhelm et Carina Kloppers nous accueillent. Lambiance nest pourtant pas à la fête. Ils ont récemment abattu tout leur cheptel pour en tirer quelque argent, car le millier denvahisseurs (deux cent cinquante familles) ont introduit sur leurs terres des centaines de vaches volées. Alors les Kloppers ont décidé de tout arrêter, de faire le dos rond et dattendre que la tempête passe. Ils sont victimes dintimidations. De menaces directes. Carina, au bord des larmes, réussit difficilement à desserrer les mâchoires :
Les envahisseurs se relaient pour venir danser et chanter toute la nuit sous nos fenêtres dans le jardin. Ils gesticulent avec des piques, des casse-tête, des haches et des lances, ils veulent nous faire craquer.
Wilhelm reprend :
On essaie bien de leur parler. On leur donne ce quils demandent : un tracteur, du fourrage pour leurs vaches, des graines de maïs à planter, une nouvelle pompe, car ils ont cassé la mienne qui fonctionnait sur une parcelle quils ont envahie.
Dialogue de sourds, car les envahisseurs ne veulent que le départ des Kloppers. Pourtant, à force de patience et de négociation, Wilhelm a fini par sentendre avec un des chefs pour lachat dune nouvelle pompe.
On sest réuni en grande palabre. Je leur ai dit que sils mapportaient cent cinq mille ZWD soit quatre cent cinquante euros, jirais leur acheter la pompe et je la leur installerais. Trois mois passent. Je les relance souvent. Ils me disent que largent arrive. Deux mois plus tard, ils sont parvenus à réunir la somme. Mais avec linflation que connaît le pays, la pompe est passée à deux cent cinquante mille ZWD. Je reviens, dépité, et là, ils maccusent de trahison, menacent de foutre le feu à ma maison, de tuer mes enfants. Il a fallu que je paie la différence. Soit ! Je veux bien faire ça pour avoir la paix. Jinstalle la pompe. Tout le monde est content, la situation sapaise. Trois semaines plus tard, ils viennent maccuser de sabotage : la pompe est cassée. Je vais voir ; malgré mes recommandations, ils ont oublié de remettre de lhuile dans le carter. Le préposé à lhuile a été égorgé la nuit suivante. Depuis cette histoire, ils memmerdent moins. Ils sont trop occupés à brûler et défricher mes forêts. Ils attendent la saison des pluies et les graines que leur promet le gouvernement. Ils peuvent toujours attendre : le principal producteur de semences du pays a été envahi lannée dernière et il narrive plus à produire. Quant à mes envahisseurs, ils hésitent entre coton et maïs, cest-à-dire entre cash et nourriture : affreux dilemme ! Moi je vous le dis, ils ne planteront rien. Ces terres ne sont viables quavec de très gros investissements et une très faible densité de population. Je suis désolé pour eux. On leur a menti, promis la lune pour se débarrasser deux. Ils ne pourront jamais survivre ici.
Ces gens, assis à ne rien faire
6 octobre 2001, chutes Victoria. Kevin est très bel homme, raffiné, distingué, lil bleu cerclé de petites lunettes dintellectuel, le verbe posé, le mot juste. Plus le profil dun banquier que dun agriculteur.
Au début, ils venaient faire le toy toy (danse de guerre) toute la nuit sous nos fenêtres avec des fourches et des lances, menaçaient nos enfants, coupaient nos arbres exotiques. Pas pour le bois ; ils savent quon adore les arbres, ils voulaient nous faire craquer. Je leur ai juste montré ma bonne volonté, et depuis, ils me laissent tranquille. Ils mont demandé de labourer leurs parcelles. Je lai fait ! Ça occupe mes travailleurs qui se tournent les pouces toute la journée, et ça fait rouler mes tracteurs. Le gazole que ça me coûte moffre la paix.
Mais qui sont ces envahisseurs ? demande Sonia. Combien sont-ils ?
Mes six cents hectares ont été divisés en soixante-huit lots de luxe pour des proches du pouvoir. Pas un seul fermier pauvre ayant besoin de terres parmi eux ! Que des fonctionnaires dHarare, des militaires, des policiers On ne les voit jamais Mais venez-donc ! Je vais vous faire la tournée des propriétaires !
Ils partent en voiture à travers les champs, sarrête à la hauteur de chaque case. Tout est labouré, rien nest planté.
Ça me fait de la peine de voir ces gens assis à ne rien faire. Dans trois semaines, les champs quils mont demandé de labourer vont être recouverts dun mètre de mauvaises herbes. Ils nont ni désherbants, ni semences, ni engrais. Le pouvoir leur a tout promis mais se moque de la terre : il veut juste nous chasser.
Mais comment faites-vous pour vivre si vous ne pouvez plus planter ?
Cela fait deux ans que je suis empêché de produire, jai dû abattre tout mon cheptel bovin, je produisais une des meilleures viandes du pays mais tout ça, cest fini. Je me suis reconverti dans mon métier premier : jachète et je revends du tabac. Il faut bien vivre. Et noubliez pas que jaie deux cents travailleurs que je paie toujours et qui nont pourtant pas le droit de travailler pour moi Ils habitent ici avec leurs familles, soit près dun millier de personnes. Je me sens responsable deux. Jachète du maïs à la tonne pour les nourrir. Si je ne le fais pas, ils crèveront de faim. Si je pars, les envahisseurs les chasseront, ils perdront tout.
Un hôpital tout neuf
Mozambique, 20 novembre 2001, à Tete, sur le fleuve Zambeze. Bernard Trouvé, le médecin du poste nous accueille Lassistanat a tout pourri en Afrique. Ça fait cinquante ans que cest du bon business, lhumanitaire ! Mais ça ne profite quaux gouvernements et aux associations. On vient de finir ici avec des fonds européens je ne vous dirai pas combien la construction dun superbe hôpital avec deux blocs opératoires, une salle de réanimation ultra moderne, deux salles daccouchement, un laboratoire et des chambres. Vous voyez un peu le topo, ici, en plein désert. Eh bien, quand le ministre mozambicain de la santé est venu pour linauguration et ça na pas été facile de le traîner jusquici la seule chose quil a trouvé à dire, cest : On nouvrira que lorsque vous aurez changé la couleur, cest pas le Brésil, ici ! Et prends ça dans la gueule ! Pour rendre lhôpital plus gai, on avait eu le malheur de le peindre en jaune, vert et bleu ciel En fait, cest sans doute quils nont pas de personnel qualifié pour le prendre en charge. Quel chirurgien mozambicain voudrait venir ici ? Ils préfèrent tous rester dans leurs cliniques privées à Maputo.
Un cri dans la nuit
Malawi, 1er décembre 2001 ; 4655e kilomètre. La route est flambant neuve. Un goudron tout lisse et tout noir offert par lUnion européenne Nous entrons sans encombre au Malawi. Le soir, ils trouvent un abri chez James Mulli, ancien pompier ayant passé neuf mois en stage à Singapour. Nous dressons notre tente dans son salon, entre les canapés, assourdis par les hallebardes drues qui tambourinent au-dessus de nos têtes sur la tôle ondulée. Sa fille, adorable, nous apporte une platée de riz avec des ufs. Nous ne cessons de nous émerveiller de la spontanéité de ces accueils. Si naturels. Si simples. Si décomplexés. Et James qui nous remercie dêtre venus chez lui. Inversion des rôles. La dignité incarnée. Sonia va faire sa toilette. Jentends bientôt un cri dans la nuit. Je me précipite : la petite salle de douche est tapissée de milliers de cafards géants. Une couche uniforme et luisante, des parois mouvantes et crissantes. Notre cher hôte na pas tout retenu de Singapour !
Plus de dix partenaires différentes par semaine
Les jours suivants, ils rencontrent un Français, le docteur Philippe Gérard, qui les invite chez lui. Il est blême parce quil travaille trop. Il est énervé parce quil a des ennuis avec des employés qui partent avec la caisse, des problèmes dabsentéisme, des animateurs anti-sida qui attrapent le sida. Tous les tracas quun esprit cartésien aux méthodes cartésiennes qui a une mission précise à effectuer, rencontre en Afrique Il mène une action originale pour lutter contre la pandémie. Le soir, avec son épouse Susanna, ils nous dressent un tableau. Noir.
Ici, comme partout en Afrique Australe, le sida est un fléau. La population est officiellement séropositive à 10 %, soit plus de un million de personnes. Et cela saggrave : 30 % des femmes enceintes sont touchées Il faut savoir quici, selon des rapports très officiels, mais impubliables, 70 % des femmes ont des rapports sexuels non désirés, quand il ne sagit pas de viols, et 70 % des filles de moins de quinze ans ont été forcées. Elles sont cinq fois plus infectées par le virus que les garçons du même âge. Jai bien dit cinq fois ! Je ne sais pas si vous voyez le topo ! À vingt ans, 70 % dentre elles ont déjà deux enfants Pour en revenir à une réalité qui contredit les benêts, il y a un cruel paradoxe : en Afrique, le sida progresse en même temps que le niveau déducation et laisance financière. Cest le phénomène du Sugar Daddy : avec un peu dargent, lemployé de bureau, le professeur, le fonctionnaire ou même lanimateur anti-sida, peut soffrir, moyennant quelques kwachas, les charmes de la jeune fille de son choix. Elles nont pas leur mot à dire À court terme, cest une déferlante dorphelins qui va submerger tous les systèmes sociaux et paralyser le pays. Ces gamins-là ne seront pas élevés, se protégeront en bandes et seront les vecteurs exponentiels du sida et de lanarchie. Mais il ny a pas que cela : Tous les jours, des hommes mavouent avoir plus de dix partenaires différentes par semaine Vous voyez, on est dans le concret, là !
Il y a aussi le fait que la majorité des gens ne croient toujours pas à lexistence du sida, car leurs voisins ou leurs proches meurent chaque fois de symptômes différents : malaria, tuberculose, maladie de peau, angine Ils ne veulent pas reconnaître que cest à cause dune relation sexuelle non protégée. La plupart du temps, les séropositifs se croient ensorcelés par un ennemi, vont voir un marabout et cherchent à se venger. Le marabout leur désigne une victime, moyennant finance, un rival ou un gêneur, de préférence, et cest une réaction en chaîne de vendettas qui commence. Quand un type meurt du sida, un autre se fait presque toujours buter dans la foulée. Une croyance est aussi répandue : seule le viol dune vierge peut lever le mauvais sort !
Cest notre règle, on ne choisit pas
17 décembre, toujours le Malawi. Notre matinée de reprise nous éprouve. Trop moite. Trop chaude. Lhorizon est vert et le goudron mouillé rayonne de vapeur en volutes. La campagne est très riche, la terre est grasse et fertile, mais les gens sont pauvres et faméliques. Pourquoi ? Il est beaucoup plus dur de survivre en Sibérie quici. Tout reste à faire, puisque rien nest fait, et pourtant, comme toujours, depuis presque un an et près de cinq mille kilomètres, nos hôtes restent bons et dignes, généreux et joyeux, disponibles et croyants, malgré leurs épreuves. Ce soir encore, nous sommes accueillis comme des rois vagabonds. La pluie devenant trop forte, nous avons couru vers une masure un peu à lécart de la route. Peter Cabage nous a ouvert sa porte dans un costume étriqué, tout élimé. Sous Banda [le président précédent, ndle] il était traducteur. Chez lui, ça pue lurine, la crasse, lhuile rance et la misère. Un coup dil à Sonia : cest notre règle, on ne choisit pas. Ce soir, ce sera ici. Peter a tout perdu sauf son anglais impeccable. Joséphine, sa petite femme chenue, nous débarrasse de nos capes ruisselantes. Sonia étouffe un cri :
Aaah ! Là ! Au plafond ! Et sur les poutres !
Au-dessus de nos têtes, entre les solives et à travers les murs, grouillent et couinent des dizaines de rats. Ils courent en tous sens, sarrêtent en même temps et repartent aussitôt comme ces petites voitures de notre enfance sur leurs circuits électriques
Quand il pleut, ils grimpent là-haut !
Un réseau ferré déglingué
Ils reprennent leur route. Nous suivons une voie ferrée désaffectée. Tout le réseau ferroviaire au Malawi est déglingué. Cest à se demander si lAfrique progresse vraiment. Il y a près de cent ans, des trains partaient dici avec leurs cargaisons de tabac, de bois, de coton et de caoutchouc, grimpaient le plateau pour rallier Blantyre, le dévalaient pour descendre au Mozambique, traversaient le Zambèze sur le pont de Mutarara et gagnaient le port de Beira. Depuis, les guerres et la corruption ont remplacé la paix et la prospérité.
Se libérer de linfluence coloniale
Stuart est né au Malawi. Il est lun des rares Britanniques à être restés, lun des très rares Blancs à posséder la nationalité malawienne. Sa femme Esther est chewa, grande, fine, au regard intelligent et doux, cerclé de petites lunettes : la distinction naturelle. Stuart se lâche quand il parle du président Mugabe, qui vient se pavaner au sommet des pays dAfrique de lEst :
Ce Mugabe est un clown triste. Que fait-il tous les matins en ouvrant lil ? Il regarde sa montre Blancpain, va dans sa salle de bain européenne, se regarde dans son miroir Baccarat, se rase avec un Wilkinson, se baigne dans une baignoire Crown avec du savon Imperial Leather, va sur des cabinets Royal Oak, se brosse les dents à lUltra-Brite, shabille dun costume Old England, se chausse de Churchs, prend un petit déjeuner continental avec du thé Lipton, des scones ou des muffins, lit le Times, le Herald Tribune et le Washington Post, monte dans sa Bentley, est reçu par un majordome en frac qui le salue en anglais, pas en shona : Good morning, Sir !, arrive au Parlement, lex-Colonial Office, meublé en style victorien, où de beaux juges en toges rouges et perruque blanche lécoutent prononcer son discours : Nous devons chasser tous les Européens, nous libérer de leur influence néocoloniale
Lesprit de mendicité
À côté de cela, le président du Malawi, Muluzi, fait le tour de toutes ses femmes avec ses hélicos, qui volent deux par deux, comme ceux de la reine Élisabeth Vous avez vu les titres des journaux ? La crise économique et la famine annoncées sont voulues et provoquées par le retard des pays donateurs. Lincroyable concept de donor country, héritier du tiers-mondisme, est très ancré dans la politique africaine. Lesprit de mendicité et dassistanat touche les plus hautes sphères de lÉtat.
Alexandre et Sonia poursuivent leur chemin : Tous les cents mètres, je dis bien tous les cents mètres, une horde bruyante de mouflets nous fond dessus : Azungus ! Azungus ! Give me money ! Give me money !
Le marché aux esclaves
Nkhotakota, 13 janvier 2002. En 1870, Jumbé, chef local, vassal du sultan de Zanzibar, exportait depuis ce marché, sous cette arcade, dix mille esclaves par an. Il décimait la région avec les redoutables bandes armées des Rugas-Rugas et des troupes yaos. En tout, cest cent mille esclaves par an qui embarquaient de ces plages de la côte ouest du lac, à bord de gros dwos, des embarcations zanzibarites sans quille à voile triangulaire, et qui débarquaient sur lautre rive, plus au nord, côté tanzanien. De là, ils marchaient enchaînés en caravanes, à la merci des pillards, de la malaria, des troupes de lions. Ceux qui ne portaient pas divoire étaient bâtés de troncs afin quils ne senfuient pas. Trente mille dentre eux mouraient en chemin, les traînards et les malades étaient impitoyablement abattus. Des hordes de hyènes suivaient ces cortèges funèbres pendant des centaines de kilomètres, attendant leur ration nocturne. Des missionnaires et explorateurs de lépoque relatent avoir suivis pendant des semaines entières ces pistes jonchés dos blanchis. Mais le calvaire des survivants nétait pas fini. De Kilwa ou de Dar es-Salaam, ils rembarquaient pour un périlleux voyage vers Zanzibar dans des conditions innommables, gisant dans leurs excréments, parmi les cadavres, sans eau ni nourriture pour être vendus par le noble sultan aux pays du Moyen-Orient et en Inde. Cest étrange, mais ce côté-ci de la traite des esclaves est moins connu, moins recherché, moins documenté que celui de la côte ouest. Comme si le fait quelle était le crime des Arabes et des Orientaux, et non des planteurs de Louisiane et des cotonniers du Havre lui attribuait un exotisme tolérable.
(Ajoutons que la quasi-totalité des marchands desclaves en Occident, depuis lAntiquité, étaient des juifs. Toutes les références figurent dans notre livre sur la Mafia juive, 2008, ndle).
Les Chinois ont moins de scrupules
Nous arrivons à Dwangwa, en plein cur de milliers dhectares de cannes à sucre. De la verdure à linfini. Fertilité industrielle. Un choc ! La plantation est vertigineusement régulière, le paysage ouvert, là où, depuis des centaines de kilomètres, nous ne traversons que des petits lopins inégaux plantés à la main. Gez Bester nous fait visiter.
Nous sommes la seule entreprise sérieuse du pays. Il y avait bien une grande riziculture menée par les Chinois, mais ils sont partis en 1996 car Muluzi voulait les racketter. Les Chinois ont moins de scrupules que nous, ils ont disparu en une semaine en laissant tout en plan. Muluzi avait aussitôt déclaré quil reprendrait la situation en main. Depuis, rien na été fait. Il ny a plus de riz au Malawi. Tout est importé. Cest un immense gâchis. Le sol est riche, leau éternelle, la main duvre disponible et volontaire. Quel pays peut proposer autant davantage. Moi je préfère travailler ici quen Afrique du Sud ou au Zimbabwe. La nature est bien plus généreuse.
Cest compter sans les pluies torrentielles qui ravagent les cultures.
Ces inondations chroniques sont dues à la déforestation sur lescarpement. Les racines ne retiennent plus la terre, la terre ne retient plus leau.
Tu te prends pour un Azungu ou quoi ?
Quelques jours plus tard : Enthousiaste et jovial, Michael Kadawira nous accueille à grandes embrassades. Evelyne, sa femme, nous adopte aussitôt. Elle nous sert un café. Nous parlons à bâtons rompus. Ils ont six grands fils qui font des études interminables et ruineuses sans trouver de travail. Des intellectuels. Pas de mécanicien parmi eux malheureusement, pas de fermier non plus. Ils rêvent tous davoir une green card, matent des films américains toute la journée et regardent les chimères de leur courageux père dun il sceptique. Quant à nous, nen parlons pas. Nous sommes pour eux des Martiens. Marcher et vouloir devenir afric eux des Martiens. oute la journée et regardent les chimères de leur courageux père detter. ains, quand eux font tout pour fuir leur africanité. Nous sommes une véritable énigme. Kadawira nous parle de la jalousie de ses voisins :
Cest le problème de lAfrique, la jalousie. Dès quil y en a un qui sort la tête, il se fait aligner. Moi, ici, je suis en permanence victime de sabotages. Je narrive pas à me faire respecter de mes ouvriers agricoles, ils viennent quand bon leur semble, quand ils ont fini leurs lopins. Si je râle, ils me menacent : Eh ! Oh ! Tu te prends pour un Azungu [un Blanc] ou quoi ? Le succès dun individu est interdit. Il na pas le droit de réussir. Cest tout le monde ou personne.
Ce soir, cest la saint Valentin !
Livingstonia, le 12 février 2002. Ce soir cest la saint Valentin. Nous avons trouvé une bouteille de blanc de blanc sud-africain pour fêter ça. Nous avons aussi trouvé nos hôtes. Ou plutôt linverse. Cest Daily Clean qui nous a alpagués sur la route. Dentrée pas très sympathique. Le genre glandeur désuvré. Nous le suivons à contrecur.
Tu en a un drôle de prénom !
Cest rien à côté de mon petit frère. Il sappelle Kilo One.
Tu sais, on a juste besoin dun petit coin pour planter la tente.
Pas de problème, je vais vous arranger ça.
Nous arrivons dans un ensemble de cases pouilleuses alors que la pluie se met à tomber. De la boue partout. Pas moyen de planter la tente. Nous nous réfugions dans une hutte abandonnée, fuyant de toutes parts. Plan glauquissime. Daily Clean est à court didées. Enervé et fatigué, je lui lance :
Daily Clean, cest gratuit, lherbe. Tu pourrais le refaire, ton chaume.
Il rigole. Une fillette dans la case joue cul nu dans sa flaque de pipi. Elle se tartine le visage de cette boue qui lentoure sous le regard amusé de son père. Une jeune mère entre, chargée de bois et deau, qui lui demande dhabiller le bébé. Le grand débile soulève la petiote par un bras et entreprend gauchement de lui enfiler un T-shirt sur son corps barbouillé de merde. Le bébé se met à hurler. La mère intervient et engueule son mari. Sonia est consternée.
Ce doit être son sixième ou septième gosse et il ne sait toujours pas faire.
Un tantinet agacé, je désigne à Daily Clean une maisonnette couverte de tôle ondulée.
Cest à ma grande sur, mais cest fermé. Il faut demander à mon père. Chez nous, tous les enfants et leurs biens appartiennent au père de famille. Le père de famille, aveugle, leur donne la clé.
À lintérieur, réminiscence : lâcre odeur durine de rat. Il en court partout à notre entrée. Cela grouille parmi des sacs de maïs, des tôles ondulées neuves et des piquets de bois.
Super glamour pour la saint Valentin !
Nous dégageons une petite pièce crasseuse quand la mère de Daily Clean vient nous montrer une énorme tumeur quelle a dans le dos. À la lampe frontale, le relief nous heurte. La boursouflure en étoile lui passe sous le bras, enfle les ganglions et attaque le sein. Sans doute un cancer de la peau. Le petite il humide et la main tremblante, elle me demande une aspirine contre la douleur. La moutarde me monte au nez !
Daily Clean ! Depuis combien de temps ta mère a ça ?
depuis deux ans. Ça ne cesse de croître.
Et en deux ans, vous nêtes pas allés voir un médecin ?
Si, mais il a demandé mille kwachas pour lopération.
Daily Clean ! Combien coûte une tôle ondulée ?
Euh, à peu près trois cent cinquante kwachas.
Est-ce que ta mère vaut moins que trois tôles ondulées ?
Euh Je ne comprends pas
Là, il y a combien de tôles neuves qui ne servent à rien ?
cinq.
Eh bien, voilà, tu décides, maintenant.
Mais on est pauvre !
Non, tu nes pas pauvre, tu es
La gorge nouée et les poings serrés, jabandonne la partie La mère martyre écoute, effarée : elle ne parle pas langlais. Elle doit être truffée de métastases à lheure quil est. Les larmes aux yeux, je lui donne son aspirine, renvoie tout le monde et vais boire avec Sonia le blanc de blancs à jeun et cul sec dans les remugles durine de rat. Toute la nuit, ils viennent couiner autour de nous et hanter mon sommeil de cauchemars et de tôles qui grincent dans le vent.
Last edited by LouSomPauII (21-11-2013 15:27:55)
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Tribulations dune Canadienne en Afrique
Karonga, 16 février 2002. Avant de quitter la ville, nous rencontrons une grosse Canadienne velue et mamelue, escortée dun beau Kényan. Elle nous raconte ses mésaventures. Dépouillée en Éthiopie, elle est allée racheter son appareil photo à son voleur, sest embarquée en direction du Kenya sur un camion de bétail qui a été attaqué à la kalachnikov avant Marsabit par des bandits somalis. Il y a eu des blessés et des vaches tuées. Arrivée enfin à Nairobi, elle a fait les frais dun braqueur qui la allégée de son passeport, de tout son argent, et encore une fois, de son appareil photo. Pour se réconcilier avec lAfrique, elle est allée se détendre et fumer des pétards sur les plages de Malindi. Descente de police, arrestation, trois jours de trou, tentative de viol, deux mille dollars damende, puis rixe avec un pickpocket à Arusha. Elle sen vante comme si elle avait décroché les valeureuses médailles de laventurière postmoderne. Il ne fait pas bon dêtre touriste en Afrique.
Les enfants numérotés
En Tanzanie, ancienne colonie allemande, personne ne parle anglais.
Mary est en deuil, elle vient de perdre son père. Toute la famille est réunie. Nous avons frappé à la porte sous une pluie battante, elle na pas eu le cur de nous dire que le moment était mal venu. La maison est pleine à craquer. Nous avions pourtant choisi la plus grande :
Vous avez convié votre famille élargie aux obsèques ?
Pas du tout, il ny a ici que les enfants et les petits-enfants. Cest vrai que je suis laînée de trente-deux enfants. Mon père a eu sept femmes ! Elles ont toutes eu une maison autour de celle-ci.
Tour à tour dans la soirée, les enfants viennent se présenter : Bienvenue, je suis numéro 16 ; Bonsoir, je suis numéro 27 ; Je vous présente numéro 32 ! Mary, soixante-trois ans, numéro 1, tient dans ses bras un petit garçonnet de trois ans, son petit frère.
La fierté dêtre tanzanien
En Tanzanie, lambiance est différente. Les gamins quémandeurs ont disparu, on ne nous invective pas plus que lon nous colle. Il y a dans lallure et le calme des gens, dans leurs saluts et leurs sourires, une incontestable dignité : une fierté dêtre Tanzanien. Ressort mystérieux de lâme dun peuple qui le pousse soit vers lavant soit le laisse assis à attendre que cela se passe. Au Zimbabwe, cétait la tristesse, au Malawi, limpuissance, ici, cest la dignité qui émane de ces gens que nous croisons, la gentillesse restant la même partout.
Isbas russes en Afrique
On y voit aussi les traces de la présence soviétique, du temps de la guerre froide. De part et dautres de la route salignent dincroyables isbas directement importées dUkraine ou dEstonie, identiques à celles que lon retrouve partout en ex-URSS de Moscou à Vladivostock. Elles ont toutes leu numéro, 1113, 1150, 2978 Murs épais, petite ouverture pour résister aux froids sibériens, portes dentrée dans un renfoncement pour éviter la neige, petites cours intérieures pour sisoler des voisins, toits de tôle ondulée rouillée et cheminées jamais utilisées, ces isbas offrent encore un nouveau visage d lAfrique sur lequel sest plaqué le fantasme dun autre peuple. Docile, elle a absorbé cette influence en lAfricanisant, en abattant un mur pour réunir deux maisons, en mettant les chèvres dans la cour, en faisant le feu sur le pas de la porte.
Les abeilles tueuses
Alexandre et Sonia subissent en Tanzanie la menace des lions et des mouches tsé-tsé qui virevoltent autour deux et qui tentent de leur inoculer la maladie du sommeil. Heureusement, ils ont leurs moustiquaires de tête. Sonia est finalement atteinte de paludisme. Il y a aussi les abeilles tueuses :
Souvent, tandis que nous marchons en silence, un bourdonnement sinistre surgit au-dessus de nos têtes : les abeilles tueuses. Tout de suite, accroupis, nous regardons lessaim passer en rase-mottes comme une nuée maléfique, la reine en tête. Une abeille soldat vient brièvement nous voir dun vrombissement inquisiteur pour constater notre allégeance et repart avec la bruyante troupe dApis Africana, labeille africaine, beaucoup plus agressive que notre gentille Apis mellifica européenne, surtout quand la reine est en déplacement. À Zomba, au Malawi, nous avions rencontrés deux Français, Patricia et Xavier Merveilleux du Vignaux, qui venaient de se faire attaquer par un essaim similaire. À deux, ils comptabilisaient près de cinq cents piqûres, et ne durent leur survie quà un rodéo denfer vers lhôpital pour se faire administrer un sérum antidote. En arrivant aux urgences, ils nétaient plus que dénormes boursouflures, piqués aux tempes, aux yeux, dans la bouche, dans les oreilles, sur les paupières. Xavier narrivait plus à décrocher ses mains du volant, crispées de tétanie, la tête gourde et le cur gagné par la paralysie.
Tribunal pénal international : tout le monde se goinfre
Mai 2002, Zanzibar. À lAlliance française dArusha, nous rencontrons Mar Basseporte, son jeune et sémillant directeur, qui nous présente, autour dun apéritif, à la communauté des Français travaillant notamment pour le tribunal pénal international (TPI) pour le Rwanda. Le TPI dispose dun budget de 190 millions de dollars par an pour juger quarante bouchers génocidaires et sauver peut-être une toute petite poignée dinnocents (aux mains pleines). Une justice de luxe ! Cest donner beaucoup dimportance à des monstres, remuer interminablement le couteau dans la plaie dun peuple qui devait plutôt penser à les panser En plus de deux ans, à peine huit personnes ont été jugées. Mais les mille employés ou appointés du tribunal y trouvent leur compte. Neuf juges internationaux payés plus de cent cinquante mille euros par an, exonérés dimpôts, brillants plus par leur absentéisme et leur ronflements en audience que par leur curriculum vitae, nommés sans contrôle par leurs États qui cherchent à les éloigner, des assistants surmenés et désabusés, des avocats rétribuant leurs clients jusquà 10 % de leurs émoluments fastueux afin dêtre désignés. Même les riches criminels sont déclarés sans ressources et voient leurs frais de défense assumés par nous tous, par vous. Tout le monde se goinfre. À tous les étages. Les commissions de surveillance le savent bien mais nébruitent rien pour ne pas salir linstitution. Ce sont elles qui constatent le taux dabsentéisme dépassant les 60 %. Les mesures dilatoires, les reports daudience, les vices de forme sont là pour prolonger la comédie : tout le monde a intérêt à ce que les jugements soient éternellement différés pour que le gâteau soit reconduit. La mission du TPI vient dailleurs dêtre prolongée jusquen 2010. Elle aura coûté en tout deux milliards deuros Et quel est lenjeu de cette mascarade ? La prison à vie ? La belle affaire ! Où ça ? En Europe, bien sûr ! Pas en Afrique ! Les témoins racontent nimporte quoi, interminablement, pour bénéficier le plus longtemps possible du gîte et du couvert offerts par le tribunal plutôt que de crever de faim chez eux, et des New-Yorkais polis, des Espagnols bien élevés, des Ukrainiens très au fait des problèmes inter-ethniques africains, des Français distants, écoutent ad nauseam comment les corps étaient découpés en rondelles, les bébés écorchés, les pucelles empalées.
Lesclavage comme culture locale
Zanzibar était au cur du trafic desclaves, autrefois. Quatre millions dhommes auraient été vendus ici. Johnson, un jeune guide, étudiant en histoire à Dar es-Salam, nous entraîne dans deux caves ayant échappé à la destruction. Les deux caves du souvenir Depuis toujours, bien avant larrivée des Européens, des esclaves étaient vendus ici pour devenir marins dans les galères de Perse, eunuques dans les harems moghols en Inde, pêcheurs de perles en Arabie et au Yémen, soldats dans les armées dOman, forçats dans les marais salants de Mésopotamie. Mais le marché sest vraiment accéléré aux XVIIIe et XIXe siècles avec les plantations de clous de girofle du sultan Seyyid Saïd, avec les marchands brésiliens qui narrivaient plus à se procurer de la main-duvre en Afrique de lOuest à cause des blocus britanniques et qui faisaient le tour du Cap de Bonne-Espérance pour venir sen procurer ici, et avec les Français qui commençaient leurs plantations de sucre et de café à lîle Maurice et à la Réunion.
Nous marquons un temps darrêt devant cette responsabilité collective. Johnson voit nos visages consternés.
Mais noubliez pas que ce commerce profitait aussi aux royaumes africains. Qui vendait les Noirs aux marchands ? Dautres Noirs ! La plupart des esclaves étaient vendus par des tribus comme prisonniers de guerre. Les Bagandas, par exemple, en Afrique de lOuest, menaient des batailles pour esclavagiser les Bunyoros et les Basogas. Les royaumes de Dahomey et dOyo sesclavagisaient réciproquement. Et avec le marché, lesclavage devint moins une conséquence de la guerre quune raison de partir en guerre ! Dans dautres royaumes, la sorcellerie, le vol, ladultère, et en fin de compte le moindre crime étaient punis par la vente de lincriminé aux marchands desclaves Tout le monde y trouvait son compte. Des esclaves étaient donnés par les villages en tribut aux rois, au même titre que, ou en remplacement, de nimporte quelle marchandise. Même les endettés pouvaient être vendus par leurs créanciers pour solde de tout compte. Des tribus voisines kidnappaient mutuellement leurs enfants quand ceux-ci avaient le malheur de sécarter de leurs villages lors des corvées de bois et deau. Pendant les temps de famine, des familles vendaient elles-mêmes les enfants quelles ne pouvaient plus nourrir. Seules quelques rares tribus ne cédèrent jamais à lappât du gain et développèrent des stratégies contre ce commerce universel qui a saisi le continent tout entier : les Jolas de Casamance, les Bagas de Guinée, les Gwolus du Ghana. Mais de ce côté-ci de lAfrique, la tendance était plutôt à la chasse sans merci. Tout le monde était coupable.
Pas de toilettes en Éthiopie
Novembre 2002, Éthiopie du Sud. Depuis que nous sommes entrés en Éthiopie, nous sommes malades. Il y a trop de mouches. Des nuées, des nuages. Pourquoi tant de mouches ? Beaucoup de bétail, mais ça nexplique pas tout. Labsence de toilettes se confirme jour après jour. Cette vieille civilisation chrétienne ne les a pas inventés. Aucune maison nest pourvue de chiottes, pas même dun trou au fond du jardin. Rien. Alors il faut sadapter. Essayer de faire ça la nuit, pour conserver un soupçon dintimité. Mais où ? Nimporte où, comme tout le monde. Dans les ruelles, derrière les maisons, dans la cour, chez le voisin, dans les champs, nimporte où. En fait, nous découvrons bientôt que les boqueteaux deucalyptus aux abords des villages servent de lieu daisances. Au lieu des agréables parfums de térébenthine attendus sen dégagent des remugles de fosses septiques. Terrain miné. Toujours occupé, voire convivial, alors on met sa pudeur dans sa poche et on fait sa colique au coude à coude avec un badaud qui en profite pour vous réclamer du PQ. Quaurait-il fait sans moi ? Mystère. Et le boqueteau est cerné : cinquante mioches et dix oisifs nous attendent, quil faut ensuite se traîner sur des kilomètres. Car les routes éthiopiennes abondent de marcheurs.
Mauvais accueil en Éthiopie
Maref ezzih yichatal ? Dunkwan allen. (Pouvons-nous rester ici pour nous reposer ? Nous avons une tente.)
Eichellem. (Impossible).
Nous essuyons de nombreux refus. Cest leur droit le plus strict. Seulement, cest la première fois que ça nous arrive [en près de 700 jours de marche, ndle]. Peut-être que cela ne se fait pas de demander lhospitalité ? Que nous ne maîtrisons pas bien les codes, les usages Quand une personne accepte, elle a tôt fait de le regretter à cause de lattroupement incontrôlable que cela provoque, qui nous oblige invariablement à nous replier dans la maison. Cest ce qui nous arrive ce soir, à la sortie de Dimeka. La dame qui nous reçoit narrive pas à endiguer le flot de curieux amassé dans son toukoul (hutte ronde recouverte de chaume). Ses bébés se mettent à pleurer. Les gens à rire. Les chiens à aboyer. Nous sommes confus. Ne sachant que faire. Cris. Bousculades. La voilà qui saisit le bâton, et lalgarade commence. Un petit type se faufile enfin, qui bafouille quelques mots danglais :
I am teacher english, come see police station.
Cest toujours comme ça que ça finit. Nous plantons la tente dans le parking des flics, entre deux voitures, après quils aient essayé de nous faire payer dix dollars une chambre dans lhôtel de passe du coin (au lieu de dix birr, soit un peu moins de dix francs). On a déjà donné ! Les nuits dinsomnie cafardeuses dans la moiteur fétide dune chambre sale, sur des paillasses informes grouillant de vermine, dans cesse réveillés par des râles de joie et des cris de fureur, des rires et des éructations alcooliques, des claquements de portes et des radios crachant des bouillies sonores saturées, des batailles de chiens et des hurlements à la mort. Nous repartons à laube sans demander nos restes. Depuis douze jours, depuis Théodoros, personne ne nous a invités chez lui. Il va falloir sy faire.
Un jour, à Kay Afer, nous apercevons un Occidental dans une gargote. Stupeur : cest un Français de Cherbourg. Seul. Il sappelle Claude Leterrier Claude nous enchante de toutes ses histoires mais nous inquiète sur la suite de litinéraire.
Jai jamais vu un pays pareil ! Jai jamais vu des enfants si mal élevés ! Ça fait près dun mois que je tourne et partout cest les mêmes you, you, you en rafales, suivis de birr-birr-birr ! [la monnaie locale]. Ça devient insupportable Cest surtout que je narrive pas à nouer des liens, à aller chez les gens, à créer une intimité. Cest la première fois que ça marrive. Je réussis sur toute la planète, mais pas ici. On dirait que ça ne les intéresse pas, quils ne veulent quune chose : quon dépense. Sauf quil ny a rien à dépenser ici !
Ouf ! Nous ne sommes pas seuls. Nous commencions à croire que cétait de notre faute
Tu vois, lorsque je vais en Inde, je vois des enfants pauvres mais qui ne mendient pas avec autant deffronterie. Et, quand il y a des attroupements, cest juste pour mater, ça ne dégénère jamais. Il ne leur viendrait pas à lidée de nous insulter. Et malgré leur pauvreté, on peut toujours partager un dalbat avec eux (plat de riz et de lentilles), des histoires, des blagues, de la fraternité, quoi ! Ici, jai en permanence la désagréable impression quils se moquent de moi.
Les enfants pot de colle
Gudwa Ashekar, le 4 décembre 2002. Largent de la Banque mondiale coule à flot dans le pays. Les infrastructures paraissent neuves.
Nous arrivons à Gudwa Ashekar un peu avant le crépuscule. Des signes avant-coureurs nous avaient fait présager le pire. Des enfants étaient partis en hurlant devant nous. Puis dautres, et encore dautres. Quand nous arrivons dans le village, cest une émeute embusquée qui nous attend. Passé la seconde de panique, nous sommes absorbés et bousculés par cette foule bruyante qui redouble de you, you, you, Franj, Faranj, Faranj [Blancs, ndle], Birr, birr, birr.
Ils sont tirés daffaire par le professeur de lécole, qui a tôt fait de disperser tout ce petit monde. Mais le lendemain matin, ça se gâte. La nuit ne les a pas calmés. À la sortie du village, un attroupement de gosses les suit bruyamment. Ils sont moqueurs et insolents.
On les traîne sur cinq kilomètres. Une heure. Puis ils se lassent, le groupe se disperse, ouf !
Mais le répit est de courte durée. Un autre groupe se reforme. Toute résistance se retourne contre nous, ça devient un jeu, pour eux. Nous sommes excédés. Que faire ? Baisser la tête, serrer les dents et accélérer la cadence. Pas dautre solution Cest oublier que nous avons affaire à des Éthiopiens, célèbres marathoniens Nous essayons alors la version lente, au pas mou et nonchalant, en traînant des pieds. Pas de problèmes, ils savent faire ça aussi. Quand nous nous arrêtons, ils sarrêtent, quand je me retourne, ils font mine de fuir, puis reviennent de plus belle. Nous nous résignons. Il faut faire avec, il faut marcher avec. Après tout, nous sommes chez eux. On est moins convaincus quand retentissent les faranj, faranj ! I kill you ! Charmants bambins
La maison est cernée !
Puis nous faisons le dos rond. Recevons sans réagir les quolibets, les perroquets, les faranj Cest ainsi que nous recevons nos premières pierres. Oh ! Pas des pavés, pas même des galets, disons des graviers, mais sur la tête, sur le coude ou dans le creux du genou, ça ne laisse pas de marbre. Cest surtout à lintérieur que ça blesse. Nous sommes impuissants Ils prennent des cailloux de plus en plus gros quils samusent à faire passer au-dessus de nos têtes. Nous sommes mal barrés Nous arrivons à Zaba sur les dents. La même émeute que ce matin se constitue. Je commence à avoir peur pour Sonia. Un homme respectable semble sindigner : nous allons droit vers lui, je lui demande de laide, il nous prend par la main et nous guide chez lui. Il est linfirmier du village et sappelle Serget. Bien mal lui a pris de nous porter secours, sa maison est cernée de toutes parts, il est contraint de nous barricader à lintérieur. Les gamins semblent crier : on va quand même pas laisser les faranj séchapper comme ça ! Ils sont à nous ! Ici, on tente de défoncer la porte, là, une fenêtre vole en éclats sous une pierre. Sonia, terrorisée, fond en larmes. Dehors, les gamins ségosillent : Faranj ! faranj ! faranj ! des adultes viennent à la rescousse pour les chasser à grands coups de latte, mais ils reviennent par intermittence nous observer dans les interstices des planches disjointes.
Ce ne sont que des enfants
Après sêtre un peu reposé, malgré tout, ils sont escortés hors du village par des amis de Serget. Mais le sursis est court, encore une fois. Des enfants réapparaissent de toutes parts, et lattroupement se reforme derrière eux. Nous avons tout essayé : les larmes, la pitié, lhonneur, rien ny fait Une salve de gravillon répond à notre désespoir Nous traversons le village de Kencho en courant, sans même nous arrêter, marchons tard dans la nuit noire pour rattraper le temps perdu et gagner Beto Dans Beto, nous trouvons par miracle un professeur danglais qui nous raconte le dernier passage dOccidentaux, il y a trois ans : rétroviseurs arrachés, vitre explosées ; ils navaient dû leur salut quà la fuite. Bienvenue à Beto ! Terrorisé à lidée dun nouvel incident, notre gentil prof nous conduit directement à la police. Nous linterrogeons :
Pourquoi de tels comportements ? Y a-t-il une pauvreté particulière dans la vallée, un mauvais souvenir dOccidentaux ?
Pas du tout ! Comme vous avez pu le constater, la vallée est riche, il y a des milliers de vaches, de lau à profusion et pas de misère des pauvres, bien entendu, mais moins quailleurs. Quant aux Occidentaux, nous nen voyons jamais ; nous navons pas de sites historiques, pas de tribus pittoresques, donc pas de touristes ; pendant la guerre, les Italiens ne sont jamais venus jusquici. Il ny a aucune raison à ces débordements, juste lexcitation. Ce ne sont que des enfants.
Largument commence à nous chauffer les oreilles. Dautant plus que ces enfants ressemblent de plus en plus à des adolescents. Cela fait deux ans que nous vivons toute la journée avec des jeunes Africains et nous navons jamais vécu ça. Le Mozambique et le Malawi étaient aussi très pauvres. La pauvreté nest donc pas un argument. Et puis, sous les pierres, aucun argument ne tient. Les jours se succèdent, ainsi que les bleds dont les noms nous rappellent tous des problèmes, du stress, des tensions : Chala, Gofa, Genda, cest pour nous toujours le même scénario. Les pères nont-ils aucune autorité sur leurs enfants ? Et nulle part où se réfugier Nous sommes blessés. Notre marche est enrayée Nous savons dores et déjà que cela restera le souvenir le plus dur de notre marche. Lexception qui confirme la règle de la bienveillance naturelle dont nous avons été lobjet depuis deux ans. Peut-être fallait-il une exception ?
Nous sommes toujours invités de force pour notre sécurité par des représentants proches ou lointains de lautorité. Peu daide. Beaucoup de moqueries. De la distance. Jamais ressenti ça sur terre ! Même lindifférence chinoise est moins douloureuse. Nous sommes la risée permanente. Nous souffrons
Un jour, à midi, nous nous réfugions sous la route, dans un tuyau de drainage en béton. Pressé déchapper aux regards, nous ne remarquons pas, au plafond, des nids de guêpes maçonnes ; nous nous faisons illico attaquer à la tête ; elles ne nous lâchent pas tant quelles ne nous ont pas injecté leur venin vengeur. Sonia se recroqueville dans un coin en miaulant tandis que je me débats comme le lion de la fable. Crise de nerfs. Jai cinq piqûres aux tempes, elle en a deux près des yeux et trois sur la main droite.
Chien de Blanc !
Dimanche 8 décembre 2002, à lentrée de Salamber Kucha.
Dès notre entrée en ville, nous tombons sur une foule denfants sortant de lécole : la mauvaise heure ! Sur le fronton, il y a une grosse étoile rouge au-dessus des trois portraits de Marx, Engels et Lénine, souvenir de linfluence encore récente des Soviétiques dans les parages. Notre surprise et nos sourires nont pas déridé les enfants. Ils se disposent en travers de la route comme pour nous barrer le passage. Nous avançons, lair de rien. À notre approche, ils lèvent des bâtons, ramassent des cailloux, prennent des postures de karaté, tout cela en rigolant et en chantant le petit air des faranj Nous essayons de ne pas nous décontenancer et avançons dun pas égal en souriant. Le barrage souvre, nous laisse passer et nous file le train dans la joie. Lennuyeux, cst que notre amharique sest considérablement amélioré ces derniers temps, et que nous comprenons de plus en plus les insultes qui pleuvent dans cette apparente liesse.
Faranj ! Faranj ! Enat Lebda (fils de pute !)
Wusha faranj ! (chien de Blanc !)
Nous essayons de trouver appui auprès dadolescents plus âgés ; ils cessent leur partie de ping-pong et se joignent à la horde, hilare. Je tente de raisonner la foule :
Zimebel ibaki ! (silence ! Sil vous plaît !)
Je nai pas le temps de finir ma phrase que les graviers volent dans notre dos
Hidt white face ! (dégagez !)
Désespéré, je cherche du regard des adultes, personne ne bouge. Chez les plus vieux ? Un sourire impuissant. Et pas un uniforme à lhorizon. Pas dinfirmier ce coup-ci, pas de prof danglais, personne qui puisse incarner une once de respect. Nous courons pour échapper à ces forcenés. Dans la horde sélève un nouveau cri :
Give me your money !
Cette fois-ci, chose étrange, ils ne nous suivent pas. Ils ont gagné. Ils nous ont chassés de Salamber Kucha. Nous les voyons au loin danser et chanter leur victoire, en travers de la route. Je nen mène pas large. Sonia a montré un sang-froid incroyable. Mais elle est toute blanche, les mâchoires serrées et les lèvres bleues On marchera de nuit, je ne sais pas ce quon fera, mais on arrivera à Addis à pied. Rien ne nous fera tricher. Cest vrai que tous les jours, des camions nous proposent de nous emmener vers la capitale, qui est encore à plus de quatre cents kilomètres.
Des rictus diaboliques
À Gassouba, le lendemain, linévitable horde se reforme derrière nous. Nous traversons le bled sans dire un mot, sans répondre aux insultes cent fois entendues. Rien. Pas un regard, pas un mot. En fait, on shabitue à tout. Les pierres se mettent à voler en tout sens, que nous ne pouvons pas voir venir, la plupart dans les jambes ; ça aussi, nous en avons pris lhabitude. Nous continuons à avancer comme si de rien nétait, mais la gamelle que Sonia porte sur son sac explose sous une pierre plus grosse. Elle se retourne et se baisse pour la ramasser, stoïque, mais ce faisant, elle sexpose aux tirs. Je me précipite pour la protéger quand japerçois dans le ciel une demi-brique décrire au ralenti une parabole vers sa nuque baissée. Vision dhorreur. Je plonge et lintercepte de la main droite. Voile noir. Une violente douleur me fait voir des étoiles ; dans mon vol, je métale de tout mon long et le relève dans un cauchemar. Jamais vu des gens rire autant. Rictus diaboliques. Ils se fendent de ma tronche. Fuir ! Il faut fuir ! Nous courons à perdre haleine. Ils ont gagné. Ils nous ont chassés de leur village. Cest encore ce quils voulaient Jai tout le côté gauche ensanglanté, éraflé par la chute. Le genou, la cuisse et lavant-bras. Les mouches sont déjà au festin. Mon petit doigt droit est tout bleu, tout gonflé. Cassé. Je boite. Enragé. Humilié. Blessé. Sonia na rien. Dieu soit loué !
Après avoir surmonté les charges de rhinocéros, déléphants, de lions, les tueurs de lAlexandra township, la barbarie des war-vets du Zimbabwe, le choléra au Mozambique, la famine au Malawi, les lions mangeurs dhommes de Rungwa, les fièvres du paludisme, les vertiges du Kili, les chaleurs du Natron, les guerres tribales entre Pokots et Turkanas, Dassanetchs et Hamers, la soif dans les déserts de la mer de Jade, nous succombons impuissants aux volées de pierres de mioches de neuf ans agissant sous le regard vaguement complice de leurs parents
Le soir, dans un taudis, chez une petite vieille consternée, en larmes de honte, on mapporte de leau pour panser mes plaies. Je suis hors service. Cette affaire ne me déclenche pas une jaunisse mais une fièvre carabinée, avec 42° C et des claquements de dents. Le grand chelem ! Sonia est secouée de frissons de terreur. Il reste vingt-deux kilomètres pour Sodo. Je délire
Ghandhisme christique
Nous partons à cinq heures du matin. La campagne est vide Quand nos tourmenteurs apparaissent, nous mettons en pratique un concept que Sonia a inventé cette nuit à la faveur dune insomnie : du ghandisme christique ! Lhumilité, la souffrance, lamour, la paix, la pitié, le pardon Et devinez quoi ? Ça marche ! Nous rallions Sodo sans trop dencombres ; les mioches sont désarmés par notre ataraxie ; nous fixons le sol ou le ciel en exprimant une indicible douleur, comme une pieta ambulante, et les rires sarrêtent, ainsi que les poursuites. Jen rajoute un peu dans le pathos, jexagère mon boitement, les gens sécartent en silence à notre passage. On ne tire pas sur une ambulance. Nous passons comme les rescapés dune catastrophe et ça les désarme. Sonia nous a sauvés. Il faut dire quavec nos tronches, nous navons pas à forcer le trait. À peine entrés dans Sodo, nous passons malheureusement devant une autre école. (Quest-ce quon leur apprend dans ces écoles ?) : la meute se reforme.
Faranj, faranj, I fuck you bastard !
Nous trouvons refuge dans le dispensaire de la mission protestante américaine Kale Hewot, où Vic et Cindy Anderson nous sauvent du gouffre moral et physique dans lequel nous sombrons. Quand la porte sest ouverte sur nous, Cindy sest exclamée :
Good Lord ! What happened to you ?
You will not believe us
Le berceau de lhumanité
Le scénario se répète une fois encore, et une autre fois encore. Alexandre et Sonia, qui ont traversé lAfrique dans les pas de lHomme, comme cest écrit en couverture de leur livre, se retrouvent à lendroit de ce quils pensent être le berceau de lhumanité, ainsi quont tenté de nous le faire croire les anthropologues cosmopolites (Lire notre livre Les Espérances planétariennes, au début de la première partie, pour comprendre ce quil faut en penser). Pour le coup, ils sont déçus : Nous sommes à Melka Kunturé, haut lieu de la paléoanthropologie mondiale, un des berceaux de lhumanité. Nous ne nous y arrêtons même pas. Au diable les pierres !
Quand je dis stop, cest stop !
En quittant Jewé, quarante-cinq kilomètres avant Addis, un type nous hèle. Cela nous arrive mille fois par jour Nous ne faisons pas attention, nous continuons. Il persévère. Dans ces cas-là, nous faisons la sourde oreille. Cest la meilleure façon de décourager les importuns. Bien mal nous en prend. Un gros lard à tête carrée me rattrape, me fout par terre en hurlant et me colle un gros calibre sur la tempe. Je nai rien vu venir. Il fait passer une balle dans le canon en attrapant le capot coulissant de son arme. Sonia tente de larrêter, il la met en joue. Il met ma femme en joue ! Vision dhorreur. On va se aire buter aux portes dAddis en plein jour. Le type est furax et aviné, il bave, il crache de rage les yeux rougis par lalcool.
Bolis ! Méché malet kum ! Kum no ! Faranju temessasié ! (Police ! Quand je dis stop, cest stop, même pour les Blancs !)
Un fou furieux, bourré de surcroît.
Yikerta, alawekum ! Algebanyem ! Aznallo (Pardon, je ne savais pas que je faisais quelque chose de mal. Je nai pas compris, désolé). Il se calme, me redresse, range son flingue, commence son interrogatoire. Je ne connaissais pas le mot kum. Grave erreur. Et il navait pas prononcé le mot police. Comment mourir sur un malentendu.
Deux mille dollars pour une petite fille
En Éthiopie du Nord, leurs misères se succèdent, là encore. Nous ne les raconterons pas Vous verrez, nous avait-on rassurés crânement à Addis, les nobles Amharas sont bien plus hospitaliers que ces barbares dOromos. Nous retrouvons les mêmes hordes denfants effrontés et quémandeurs. Nous ne nous expliquons plus de tels comportements. Nous les subissons, un point cest tout. Nous fuyons.
Le reste de leur marche dans ce pays se fait en compagnie de Tekleye Asfaw, lieutenant dans larmée, qui sest fait entièrement dépouiller à Addis, et tente de rejoindre son village. Cest lui qui les protégera sur la route et dans les villages.
Au bout de cinq jours en notre compagnie, passés à écarter les indésirables, chasser les railleurs, répondre aux suspicieux, il est sur les dents ; dévoré de honte des comportements dont il est témoin. Il en vient même au main avec un enfoiré qui, après avoir vu Sonia jouer avec une petite fille, sest adressé à nous dans un anglais précis qui trahissait son habitude de ce genre de pratique :
Elle vous intéresse ? Si vous voulez, je peux marranger avec sa mère. Deux mille dollars, ça ferait laffaire ? Vous avez raison dadopter des petits Éthiopiens, nous sommes les plus beaux.
Excision et mariages forcés
En Éthiopie, les filles suivent un traitement spécial. Elles sont excisées, sept jours après la naissance. Lèvres et clitoris. Comment fait-on pour exciser un clitoris de sept jours ? À Addis, nous avons rencontré une femme médecin éthiopienne, membre de lONG Save the children, qui fait de la lutte contre cette mutilation son cheval de bataille. Elle nous en a raconté tous les dessous. Lexcision se pratique à grande échelle, sur des millions de fillettes éthiopiennes. Le mariage des enfants est lui aussi monnaie courante. Dès six ou sept ans, une fillette peut être mariée à un homme adulte contre une forte dot négociée interminablement entre parents. Ces mariages sont sans doute les plus tristes de la Terre., les petites épouses vivent la fête en larmes malgré les cadeaux et les tissus chatoyants dont elles sont couvertes. Les hommes sengagent par contrat à ne pas les toucher avant leur puberté. Malheureusement, alcool et désuvrement aidant, beaucoup dentre elles passent à la casserole avant lheure, ce qui entraîne des problèmes gynécologiques épouvantables, perforations et fistules, qui les rendent prématurément incontinentes ou stériles, en conséquence de quoi, elles sont répudiées et renvoyées à leurs familles.
Il suffirait de creuser des puits
Un Belge, Franck Beernaert, ingénieur agricole, leur explique le pays :
On croit toujours que lÉthiopie est un pays désertique, mais il pleut ici autant que dans beaucoup de coins de France, bien plus quen Afrique du Sud en tout cas, mais le problème, cest que les précipitations sont concentrées sur les quatre mois de lété. Pour régler ça, il suffirait de créer des réserves deau, des petites retenues villageoises La terre repose sur un socle volcanique, entre trois et dix mètres en dessous, qui retient leau. Il suffit de creuser des puits et leau est à portée de main. Mais les puits nexistent pas dans la culture éthiopienne, on préfère envoyer les filles au loin, chercher leau à la source. Il y a cent mille puits à creuser dans ce pays, et dix millions de toilettes à installer.
Cest vrai ça ! Pas vu de puits dans le pays. Pas plus que de fosses daisances. Doù vient cette réticence à creuser la terre ? En revanche, nous avons souvent marché des kilomètres avec des cohortes de jeunes filles aux épaules cisaillées par les sangles des lourdes jarres deau quelles se calent aux creux des reins.
Les fausse famines
Franck Beernaert poursuit, au sujet du gouvernement éthiopien : Cette année, ils ont inventé une fausse famine. Ils annonçaient deux cent mille personnes affectées dans lOgaden et soixante-dix mille morts en perspective, le bétail anéanti. Heureusement quon a envoyé quelquun y voir ! Il navait pas plu comme ça depuis dix ans ! Lherbe était haute dun mètre, et les vaches bien grasses. Du foutage de gueule ! Mais cette fois, on nest pas tombés dans le panneau Il y a une concurrence entre les États donateurs. Le gouvernement fait monter les enchères. Cest à celui qui donnera le plus entre USAID, lEurope, GTZ, le British Council, les Suédois, les Danois, les Japonais, les Français, et même les Israéliens. Quand on rechigne à donner, ils déplacent une population celle qui les gêne, bien sûr dans un coin chaud et sec où elle va provoquer une petite catastrophe humanitaire qui réamorce la pompe à fric Ils voient donc dun très mauvais il les succès agricoles de GTZ à Debré Tabor ils ny gagnent rien Et moi, je reçois la visite incessante dauditeurs et de spécialistes de Bruxelles qui écrivent des rapports qui ne seront lu par personne Dans les rapports quon me réclame, il marrive décrire en milieu de texte : La vache qui rit ! et une page plus loin Avez-vous vu la vache qui rit ? Je nai jamais reçu la moindre remarque.
Le Soudan : la libération
Après sêtre faits escroqués à la frontière, Alexandre et Sonia parviennent enfin au Soudan. Cest une libération. Il fallait quitter lÉthiopie pour se rendre compte à quel point nous nous étions blindés et combien elle nous était douloureuse.
Les gens du pays sont ici affables et accueillants, mais la chaleur est accablante. Le thermomètre grimpe tous les jours jusquà cinquante degrés à lombre. Ils marchent au petit matin et en fin de journée, après la fournaise. Vers 10 heure et demie ou 11 heures, épuisés, avec seulement quine ou dix-huit kilomètres dans les jambes, nous nous dirigeons vers la première maison. Cest toujours la bonne. La règle absolue. Nous navons même pas besoin de demander, on nous y accueille avec un naturel aussi évident et surnaturel que le ciel est bleu. Et commence la merveilleuse tirade des salamalecs, préambule eux présentation :
Asalam aleykoum !
Maleykoum salam !
Kef ?
Kullu tamam! (Que la paix soit avec toi ! et pour toi aussi ! Comment vas-tu ? Tout va bien. Grâce à Dieu tout va bien ! Que la chance de Dieu te protège ! Il y a une grâce divine ! Louange à Dieu ! Dieu est merveilleux !). Et le disque reprend, deux ou trois fois selon le degré amplifié par notre virtuosité en la matière. Quand ça sarrête, tout devient calme et serein. Placé sous de bons hospices. Dieu et les hommes sont contents Le miracle permanent de lhospitalité soudanaise se reproduit, comme par enchantement. Nous pénétrons ainsi, chaque jour, dans la vie de trois ou quatre familles qui forment des perles dor de notre collier de rencontres.
Premières impressions du monde arabe
Fareig, nord-Soudan ; 20 septembre 2003. Là, on entre dans le monde arabe : Le plus souvent, ce sont les femmes qui nous reçoivent. Les maris ne sont jamais là. Ils sont en Arabie saoudite ou dans les émirats, ce qui explique le niveau de vie élevé de ces familles installées dans le désert Dans chaque famille, il y a une aroussa qui se languit de son mari. Pendant leur première année de mariage, les jeunes femmes jouissent dun statut privilégié ; on leur aménage une chambre nuptiale décorée de rubans rouges, de tentures roses, où trône un immense lit encombré de coussins de satin, accompagné de sa penderie à miroirs, de tables de nuit et dune coiffeuse. Elles sont les reines de la maison ; tout le monde est aux petits soins ; elles se maquillent, shabillent élégamment, on leur épargne toutes les tâches ménagères. Elles nont quune mission : produire un héritier. Malheureusement, les deux ou trois visites du géniteur ny suffisent souvent pas et la jeune femme sent peu à peu monter la pression. Dès la deuxième année, elle déchoit de son piédestal ; une troisième année de mariage sans enfant confirme sa déchéance : on la déménage de la chambre nuptiale ; la quatrième année, elle devient lesclave de la maison, le souffre-douleur de ses belles-surs et de ses nièces ; la cinquième année, elle peut être répudiée et renvoyée à ses parents.
Dans les villages quils traversent, les maisons sont blanchies à la chaux. Les portes dentrée sont ouvertes sur des cours splendides de sérénité, bordées de déambulatoires ombragés. Des pigeonniers lâchent des vols de colombes immaculées sur le ciel cru. Nous pourrions nous arrêter partout. Toutes les femmes que nous croisons nous hèlent. Un supplice de Tantale. Nous sommes parfois contraints de nous cacher dans les palmeraies pour échapper à cette hospitalité frénétique. Il faut sarrêter partout. Déguster de tout. Nous sommes accablés de gentillesse.
Le tableau de lAfrique nest donc pas entièrement noir, si lon peut dire. Il nen demeure pas moins que ces visions fugaces des murs et coutumes africaines, permettent de mieux comprendre le désordre et la gabegie qui règnent trop souvent dans ces pays. Les Blancs ny sont pour rien. Désolé ! Et certains Africains, plein de haine et de rancur à légard des anciens colonisateurs, seraient bien inspirés, après leur études en France, de rentrer dans leur pays dorigine pour aider leurs frères, plutôt que de vivre en parasite parmi ces Blancs quils détestent tant. Cest pour eux que nous avons recopiés ces témoignages. Hervé Ryssen
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